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 - 14 avril 2024 - Sainte Lidwine
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Homélie

7e dimanche du Temps Ordinaire

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Auteur :

Frère Dominique, fsj

La bible:

Saül a laissé une mauvaise image dans les mémoires. Il était pourtant un homme de bien, il était celui que le Seigneur avait accepté de prendre pour roi d’Israël. Mais l’exercice du pouvoir l’a corrompu, il a peu à peu perdu le sens de la justice et sa fidélité au Seigneur. Sa révolte l’a même décidé à faire mourir David, celui que Dieu a choisi pour le remplacer sur le trône.

Aussi la première lecture est-elle une belle introduction à l’évangile de ce jour. David est clairement victime d’une injustice grave, et, vu le nombre et l’intention des troupes lancées à sa poursuite, on peut dire que dans cet épisode, il est en position de légitime défense. Abishaï n’hésite d’ailleurs pas à voir la main de Dieu dans cette occasion inespérée de mettre fin à cette dangereuse jalousie du roi : « aujourd’hui, Dieu a livré ton ennemi entre tes mains ».

Il n’est pas rare que nous soyons ainsi tentés d’attribuer à Dieu ce qui n’est qu’une justice humaine, toujours fragile et imparfaite, souvent exposée aux limites et aux égoïsmes des personnes. Mais Jésus attend de nous davantage : « Je vous le dis, à vous qui m’écoutez : aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent ». Jésus attend de nous que nous allions contre l’élan spontané de la nature, que nous contrarions notre instinct spontané de rendre le mal pour le mal.

Comment vivre une telle exigence ? David nous apprend à faire le premier pas : « je n’ai pas voulu porter la main sur le roi, qui a reçu l’onction du Seigneur ». Au-delà de son comportement profondément injuste, David a su voir en Saül la dignité de cet homme, objet d’une alliance particulière avec le Seigneur. Quelle que soit son attitude, l’homme reste un être exceptionnel par sa relation unique au Dieu créateur.

Cette considération nous permet, d’une certaine manière, de nous mettre à la place de l’homme injuste. Car nous avons tous en commun d’avoir commis le mal. Nous avons tous fait l’expérience de notre fragilité et d’avoir désiré l’indulgence des autres. Pourquoi donc ne pas agir envers les autres comme chacun voudrait que l’on agisse envers lui-même ? C’est exactement ce que nous demande Jésus : « Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux ». Tout être humain nourrit en lui-même l’espérance de ne pas demeurer à jamais prisonnier de ses erreurs et de ses fautes, il rêve de pouvoir à nouveau lever les yeux vers l’avenir, pour découvrir qu’il a encore la possibilité de faire confiance et de s’engager. À la demande de Jésus, offrons aux autres que ce rêve devienne réalité. Entrons dans le pardon.

Nous avons pour cela l’expérience et l’appui du pardon de Dieu. Le psaume nous montre le chemin : « Bénis le Seigneur, ô mon âme, n’oublie aucun de ses bienfaits ». Le souvenir des bienfaits de Dieu pour nous, nourrit la force d’être bon comme Dieu est bon pour nous. En effet, Dieu « n’agit pas envers nous selon nos fautes, ne nous rend pas selon nos offenses », « il pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie ». C’est dans ce pardon de Dieu que nous sommes rendus capables de cette forme particulière de l’amour qu’est le pardon. C’est pourquoi Jésus nous demande en toute simplicité : « soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux ».

Il est pourtant une dernière résistance à vaincre pour accomplir la volonté de notre Seigneur. Il demande en effet : « A celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre », et encore : « ne réclame pas à celui qui te vole ». Si nous comprenons bien qu’il nous faut renoncer à la rancune et à la vengeance, devons-nous accepter également de renoncer à la justice ?

Là est le passage le plus délicat de notre itinéraire. Le pardon s’oppose bien à la rancune et à la vengeance, mais il ne s’oppose pas à la justice. Cependant la justice doit être complétée par le pardon qui guérit les blessures et qui rétablit en profondeur les rapports humains perturbés. Réclamer au voleur ce qu’il a pris est la simple justice. Ne pas le faire est lui apprendre, en transformant le vol en don, que le chemin de la fraternité est encore accessible et toujours préférable. A quoi bon voler celui qui est prêt à offrir et à accueillir ? A quoi bon se faire des ennemis quand la fraternité peut être vécue ?

Il s’agit donc d’évaluer nos investissements ! Saint Paul nous y aide dans la deuxième lecture. Ce qui apparaît d’abord, « ce n’est pas l’être spirituel, c’est l’être humain ». « Le premier homme vient de la terre », il nous pousse à préférer la vengeance et la violence. Elles ont l’avantage de donner une satisfaction immédiate, mais elles préparent toujours des lendemains de violence et de vengeance. Mais « le dernier Adam - le Christ - est devenu l’être spirituel qui donne la vie ». Lui nous invite à préférer le pardon. A court terme, le pardon engendre toujours une perte (par exemple, celle de l’objet volé que l’on renonce à récupérer), mais à long terme il est un gain réel : nous avons gagné un frère ! En outre, nous avons grandi nous-mêmes, « nous serons à l’image de celui qui vient du ciel », car il faut une grande force d’âme pour donner le pardon comme pour le recevoir. Pardonner construit une humanité plus profonde et plus riche, capable de refléter l’amour inconditionnel de Dieu pour les hommes. C’est aussi ce que nous laisse entrevoir Jésus quand il dit : « votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Dieu très-haut »

C’est ainsi qu’il nous faut accueillir l’affirmation de Jésus : « Donnez, et vous recevrez une mesure bien pleine, tassée, secouée, débordante, qui sera versée dans votre tablier ; car la mesure dont vous vous servez pour les autres servira aussi pour vous ». Il ne s’agit pas de redouter que Dieu refuse de nous pardonner, nous avons vu que son pardon est premier. Mais pardonner comme Dieu nous y invite, nous aide à pénétrer le mystère de son amour pour nous. C’est par le pardon que Dieu nous apprend à aimer comme lui-même aime. Nous aurons ainsi de moins en moins de mal à nous exposer à son pardon et à l’accueillir dans sa plénitude. La mesure dont nous nous servons pour les autres, servira aussi pour nous.

Seigneur Jésus, à la veille d’entrer en carême, tu nous invites à redécouvrir la grandeur et la beauté de notre vocation à l’amour. Donne-nous de mener victorieusement le beau combat du pardon pour que tout homme soit préservé dans sa dignité et que ton Royaume soit manifesté aux yeux de tous.


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