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 - 24 avril 2024 - Sainte Marie-Euphrasie Pelletier
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Homélie

Férie du Temps Pascal

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Auteur :

Père Joseph-Marie, fsj

La bible:

Voilà une page de l’Évangile que nous aurions tendance à tourner rapidement, tant il est vrai qu’elle nous met dans une position inconfortable. « Si le monde a de la haine contre vous » : la haine est plus que le non-amour ou l’indifférence ; il s’agit d’une passion de l’âme, d’un dynamisme vital très puissant, dont la nature nous a pourvus afin de nous permettre d’éliminer ce qui menace notre bien ou veut nous empêcher de l’atteindre.
Avouons qu’il n’est pas particulièrement agréable de s’entendre dire que le monde nous repousse comme des trouble-fêtes voire comme une menace pesant sur le progrès de l’humanité. Pourtant, n’est-ce pas le discours que l’on entend diffuser à dose de plus en plus allopathiques ? Aux yeux du monde, les chrétiens apparaissent en effet comme les derniers représentants d’une humanité en voie de disparition - celle qui a dominé sur « l’ère du poisson ». « Quand donc les croyants vont-ils réaliser que le temps de l’hétéronomie est clos ? » s’interrogent nos contemporains. « N’ont-ils donc pas compris que les cieux ont été vidé du Monarque divin qui régentait l’univers par sa Parole toute-puissante ? Dés lors, il n’y a plus de loi, plus de norme morale, plus de valeurs qui s’imposent de manière universelle. Le moralisme chrétien est une insulte à l’autonomie de l’individu au sein de la société libérale. Il est temps que cesse cet anachronisme ! » En attendant sa disparition prochaine, la religion est renvoyée à la sphère privée pour éviter qu’elle ne fasse obstacle à l’expansion de la liberté individuelle, appelée à triompher de tous les conditionnements…
A vrai dire, ce discours n’est nouveau que sur la forme ; sur le fond, il est aussi ancien que le christianisme. Jésus nous a avertis : « Si le monde a de la haine contre vous, sachez qu’il en a eu d’abord contre moi ». Le miroir aux alouettes de l’autonomie absolue fut le premier piège tendu avec succès par le « père du mensonge » (Jn 8,44), qui n’a aucune raison de modifier une stratégie qui porte du fruit : « Vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal » (Gn 3, 5). A la suite du Christ, le chrétien dérange parce qu’il incarne la conscience religieuse et morale de l’humanité, dont il rappelle par sa seule présence la destinée surnaturelle. Refusant de participer à la construction de la Babel planétaire qui a pour devise « l’amour de soi au mépris de Dieu », il poursuit son pèlerinage vers la Cité sainte, qui invite à « l’amour de Dieu au mépris de soi » (Saint Augustin). Entre ces deux appartenances, il faut choisir. Certes pour vivre en chrétien dans nos sociétés pluralistes, des compromis sont nécessaires ; mais toute compromission serait fatale et dès lors à proscrire. Or c’est ce refus qui déchaîne précisément la haine, comme le confirme Jésus dans l’Évangile de ce jour : « voilà pourquoi le monde a de la haine contre vous : parce que vous ne lui appartenez pas, puisque je vous ai choisis en vous prenant dans le monde ».
Au second siècle de l’ère chrétienne, l’auteur de la lettre à Diognète témoignait déjà de l’actualité de cette parole dans le contexte culturel qui était le sien. Parlant des chrétiens il écrit : « Les Juifs leur font la guerre comme à des étrangers, et les Grecs les persécutent ; ceux qui les détestent ne peuvent pas dire la cause de leur hostilité ». Pour expliquer cette situation paradoxale, l’auteur de la lettre fait appel à une image particulièrement parlante : « Ce que l’âme est dans le corps, les chrétiens le sont dans le monde. La chair déteste l’âme et lui fait la guerre, sans que celle-ci lui ait fait de tort, mais parce qu’elle l’empêche de jouir des plaisirs ; de même le monde déteste les chrétiens, sans que ceux-ci lui aient fait de tort, mais parce qu’ils s’opposent à ses plaisirs ».
L’histoire de l’Église nous enseigne que cette hostilité peut devenir violente, voire meurtrière, conformément à la prophétie de Notre-Seigneur : « Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera, vous aussi. Le serviteur n’est pas plus grand que son maître. » C’est donc à son école que nous devons apprendre l’attitude qui convient en réponse à cette hostilité. Il ne saurait être question de haïr ceux qui nous rejettent ; Jésus nous ordonne tout au contraire d’« aimer nos ennemis et de prier pour ceux qui nous persécutent, afin d’être vraiment les fils de notre Père qui est dans les cieux » (Mt 5,45). Cette attitude de miséricorde est même la réponse la plus convaincante, celle qui peut toucher les cœurs : « Si l’on a observé ma parole, on observera aussi la vôtre. » C’est à travers ce témoignage de fraternité universelle, que ceux-là même qui nous haïssent pourront découvrir le visage du Père, « qui fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 5,45). Telle était l’attitude que préconisait déjà l’auteur de la lettre à Diognète : « L’âme aime cette chair qui la déteste ainsi que ses membres, comme les chrétiens aiment ceux qui les détestent. L’âme devient meilleure en se mortifiant, et les chrétiens, persécutés, se multiplient de jour en jour. Le poste que Dieu leur a fixé est si beau qu’il ne leur est pas permis de le déserter. »

« Seigneur devant les vents contraires d’une “cataphobie” de plus en plus agressive, ne permets pas que nos cœurs se troublent ou que notre foi défaille. Mais “donne à ceux qui te servent d’annoncer ta parole avec une parfaite assurance” (Ac 4,29). Que nous soyons “toujours prêts à nous expliquer devant tous ceux qui nous demandent de rendre compte de l’espérance qui est en nous” (1 P 3,15). Renouvelle-nous dans l’Esprit de charité, afin que nous puissions le faire “avec douceur et respect” (Ibid.), témoignant de toi par “une conduite parfaite. Ainsi, alors même qu’ils nous calomnient, nos détracteurs auront devant les yeux nos bonnes actions, et finiront par te rendre gloire” (1 P 2,12) à toi, Père universel et Sauveur de tous les hommes. »


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