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 - 26 avril 2024 - Bse Alida
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Homélie

Saint Pothin, sainte Blandine et leurs compagnons,

Etonnant passage, qui se présente comme un havre de paix au milieu des discussions tendues avec les ennemis du Seigneur, la dernière l’ayant confronté aux sadducéens sur la question de la résurrection. Le scribe « s’avance » : il sort du groupe, de l’anonymat et s’approche de Jésus pour un vrai dialogue, sans arrière pensée. Sa démarche n’est ni polémique, ni simplement académique ; certes la question qu’il pose est tout à fait classique : il était habituel en effet de demander à un rabbi de synthétiser tous les préceptes de la Thora en un seul, dont découleraient tous les autres - c’était une manière de lui faire préciser la clé dont il se sert pour « ouvrir » les Ecritures. Mais la suite de l’entretien montre bien que cet homme est concerné par sa demande.
Sans hésiter, Jésus cite la prière traditionnelle du Shema Israël (Dt 6, 4-5) que tout juif pieux murmurait matin et soir. En fait le « premier commandement » qu’il propose, en contient déjà deux, puisque la citation du Deutéronome commence par l’impératif : « “Ecoute”, c’est-à-dire de tend l’oreille de ton cœur et fais-toi tout enseignable ; reçois avec bienveillance la Parole du Seigneur ». Ce qui veut dire que la suite n’est pas objet de discussion, mais est de l’ordre de la révélation ; il s’agit d’une vérité que nous sommes invités à recevoir avec reconnaissance, comme fondement absolu de tout ce qui pourrait suivre. Or ce « credo » de base rappelle l’unité du Dieu d’Israël : « le Seigneur notre Dieu est l’unique Seigneur ». Dans l’Esprit Saint nous pouvons ajouter : « il n’est pas d’autre Dieu que celui qui se révèle à nous à travers son Fils, Jésus-Christ Notre-Seigneur. C’est en lui et en lui seul que nous voyons le Père (Jn 14,9) ; c’est lui le chemin, la vérité et la vie ; personne ne va vers le Père sans passer par lui (Jn 14,6) : il est la Porte (Jn 10,9) qui nous donne accès à la vie éternelle ». Ces versets, auxquels nous pourrions en ajouter bien d’autres, ne sont pas objet de débat pour les croyants, puisqu’ils constituent le fondement de leur foi au Christ. Certes nous sommes invités à les approfondir rationnellement, mais à partir d’une adhésion inconditionnelle préalable, et non en vue d’évaluer leur crédibilité ou leur véracité en fonction de critères externes à la Révélation.
La seule réponse qui soit digne de cette initiative totalement gratuite de Dieu, ne peut être qu’un amour réciproque : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu ». L’amour peut-il être objet de précepte ? Je crois qu’il faut oser répondre « oui ». De même que Dieu éveille notre intelligence et l’invite à demeurer attentive, à accueillir l’enseignement de sa Parole, ainsi le même Seigneur sollicite notre volonté afin de l’arracher à son inertie et de lui redonner la dimension extatique qu’elle avait à l’origine, avant que le péché ne la défigure. L’insistance de l’appel est notoire : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force », c’est-à-dire « de tout ton être, engageant toutes tes facultés à son service, afin de t’arracher au narcissisme qui t’entraîne spontanément à te replier sur toi-même ».
Ce n’est que lorsque nous aurons réussi à quitter notre prison intérieure, avec l’aide de la grâce qui nous donne de répondre à l’appel de Dieu, que nous pourrons satisfaire au second commandement : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (cf. Lv 19, 18). Le décentrement de nous-même vers Dieu, opéré par l’Esprit Saint dans la prière, nous prépare au décentrement de nous-même vers les autres, opéré par ce même Esprit dans nos œuvres de charité.
« Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là ». Saint Augustin disait à sa manière : « Aime et fais ce que tu veux ». Aime le Seigneur ton Dieu et aime ton prochain en lui, dans sa lumière, c’est-à-dire dans son Esprit, et tu demeureras fidèle aux commandements. Bien plus : en tout ce que tu fais, tu les conduiras à leur accomplissement.
Il est rare - c’est même un cas unique ! - d’entendre un scribe faire l’éloge de Jésus. L’Esprit a touché le cœur de cet homme, qui ajoute « une remarque judicieuse », que Notre-Seigneur approuve pleinement : obéir au précepte de l’amour de Dieu et du prochain « vaut mieux que toutes les offrandes et tous les sacrifices ». Sans doute le scribe a-t-il fait le rapprochement entre les paroles de Jésus et le prophète Osée : « C’est l’amour que je désire, et non les sacrifices, la connaissance de Dieu, plutôt que les holocaustes » (Os 6, 6).
« Tu n’est pas loin du royaume de Dieu » : que lui manque-t-il donc à cet homme pour y entrer ? N’a-t-il pas compris l’essentiel ? Incontestablement, il a saisi l’essentiel de la première Alliance ; mais il reste pourtant au seuil de la Nouvelle Alliance, car on n’y pénètre que par le porche de la foi au Christ. En Jésus et en lui seul nous avons le rachat, le pardon des péchés ; en lui et en lui seul nous sommes réconciliés avec le Père (cf. 2 Co 5, 18) et « devenons participants de la nature divine » (2 P 1,4) selon son éternel dessein d’amour.

« Seigneur garde-nous de mépriser le don que tu nous fait de pouvoir te connaître et de pouvoir t’aimer dans l’Esprit Saint. Donne-nous de nous souvenir à chaque instant de l’appel qui repose sur nous. Au soir de notre vie, nous ne serons pas jugés sur nos œuvres, mais sur la générosité de la réponse que nous aurons donnée au murmure de ta voix, qui nous invite à nous décentrer de nous-même pour entrer dans la liberté du don. Vierge Marie, apprends-nous à nous oublier, afin de pouvoir entrer dans la gratuité du Bel amour. »


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