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 - 27 mars 2024 - Saint Habib
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Homélie

Saint Grégoire le Grand, pape et docteur de l’Église

La guérison de la belle-mère de Pierre, que Jésus relève de sa fièvre, voilà un miracle en apparence bien insignifiant ; au point qu’on est enclin à se demander pourquoi saint Luc en fait mention ? Notre étonnement grandit encore lorsque nous découvrons qu’il s’agit du tout premier miracle relaté dans le troisième évangile ! Dans la logique narrative, il devrait donc avoir une valeur paradigmatique et orienter l’interprétation de tous les miracles qui vont suivre. Bref, les deux versets qui introduisent l’Évangile de ce jour, méritent toute notre attention.
Il n’est pas dit que Jésus « sort » de la synagogue, mais qu’il la « quitte » : elle a terminé son rôle ; elle était le lieu de l’attente de la venue de celui qui devait « accomplir les Écritures » (Lc 4,21). L’autorité avec laquelle Notre-Seigneur y a enseigné doit suffire aux juifs pieux et ouverts à l’action de l’Esprit pour reconnaître en lui le Messie de leur espérance. En tout cas le démon, lui, a perçu le caractère unique de ce « Jésus de Nazareth » ; mais son intervention intempestive, destinée à troubler les esprits, se solde par un échec : il est contraint de « sortir » de l’homme dont il avait pris possession, confirmant par cette défaite « l’autorité et la puissance » de Jésus.
Notre-Seigneur quitte donc l’ancien lieu de culte pour entrer dans la maison de Simon-Pierre, symbole de l’Église. « La belle-mère de Simon était alitée, oppressée par une forte fièvre » ; il s’agit donc de la mère de l’épouse de l’hôte de Jésus. Les femmes n’avaient guère la préséance dans la société juive de l’époque ; a fortiori la mère de l’épouse du maître de maison devait-elle se contenter des services subalternes. C’est donc au chevet de quelqu’un de retiré, de discret, faisant partie des sans-voix et des sans-droits que se rend Notre-Seigneur. Il est remarquable que le premier membre de l’Église à être nommé dans le troisième Évangile, est une femme, et une femme « de second rang » dans la hiérarchie sociale. « Ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion les sages ; ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour couvrir de confusion ce qui est fort ; ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est rien, voilà ce que Dieu a choisi pour détruire ce qui est quelque chose, afin que personne ne puisse s’enorgueillir devant Dieu » (1 Co 1, 27-28).
Jésus non seulement s’approche de la femme, mais « se penche sur elle » dans un geste de compassion, comme une mère se penche sur le lit de souffrance de son enfant malade. Il « interpelle vivement la fièvre » : l’expression surprend car Notre-Seigneur semble prendre autorité sur la fièvre comme sur les démons. S’agit-il d’une actualisation de la victoire de Jésus sur Satan au désert (Lc 4,1-13) ? Ou est-ce l’autorité de sa parole que Saint Luc veut à nouveau souligner par cette expression ? De même que Dieu créa les univers par son Verbe, il les recrée par ce même Verbe, venu dans la chair pour prendre autorité sur l’instigateur du péché, et sur toutes ses conséquences dans nos vies désormais vouées à la mort.
A peine la fièvre est-elle chassée, qu’« à l’instant même la femme se leva et elle servait » Jésus. Le verbe grec utilisé par Luc pour exprimer le redressement de la belle-mère de Simon, est le même que celui qu’il utilisera pour signifier la Résurrection de Notre-Seigneur. Par ce procédé littéraire, l’évangéliste veut rapprocher les deux événements et signifier que les guérisons opérées par Jésus sont autant de participations à la victoire de celui qui a assumé notre condition mortelle pour nous donner part à sa vie immortelle. Le relèvement opéré par l’autorité de la Parole de Jésus, permet à la femme qui était auparavant clouée sur son lit dans une passivité forcée, à reprendre du service. Autrement dit, la participation à la vie du Ressuscité est inséparablement participation à sa condition de serviteur. La finalité du miracle n’est pas simplement le retour à la santé de la malade, mais son insertion dans la vie même du Christ, qui se manifeste par l’attitude de service. La libération apportée par Jésus n’atteint pas son but dans la confession de foi plus qu’ambigüe proclamée par les démons, mais dans le service de la charité, qui témoigne de manière irréfutable de la délivrance opérée par Notre-Seigneur. Saint Jacques dira : « Tu crois qu’il y a un seul Dieu ? Tu as raison. Les démons, eux aussi le croient, mais ils tremblent de peur. L’homme devient juste par ses actes, et pas seulement par sa foi. En effet, comme le corps qui ne respire plus est mort, la foi qui n’agit pas est morte » (Jc 2,19.24.26).
La véritable finalité des guérisons, exorcismes et autres miracles accomplis par Jésus tout au long des Évangiles, apparait ici en pleine lumière : Notre-Seigneur est venu pour nous libérer de l’inertie du péché qui nous paralyse dans nos peurs et notre égoïsme, et pour nous rendre participants dans l’Esprit, de son pouvoir divin d’aimer et de servir nos frères, au prix de notre propre vie. « Le plus grand d’entre vous doit prendre la place du plus jeune, et celui qui commande, la place de celui qui sert. Quel est en effet le plus grand : celui qui est à table, ou celui qui sert ? N’est-ce pas celui qui est à table ? Eh bien moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert » (Lc 22,26-27).

« Père saint, conformément au souhait de ton apôtre Paul, donne-nous “la grâce et la paix” (1ère lect.). La grâce de nous arracher à notre individualisme, à nos indifférences, à notre lâcheté, à nos paresses coupables ; la grâce de nous lever dans la puissance de la Résurrection de ton Fils ; la grâce de nous mettre généreusement au service de nos frères dans l’amour. Alors “ta paix qui dépasse tout ce qu’on peut imaginer, gardera notre cœur et notre intelligence dans le Christ Jésus” (Ph 4,7) notre Seigneur. »


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