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 - 24 avril 2024 - Sainte Marie-Euphrasie Pelletier
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Homélie

vendredi, 10ème semaine du temps ordinaire

Nous pourrions intituler cet extrait : « de la concupiscence à l’amour ». La Loi n’est pas simplement un interdit régulateur de la vie sociale ; bien comprise, elle est un pédagogue sur le chemin de l’amour. Mais pour cela il faut pénétrer au-delà de la lettre jusqu’à l’intention du Législateur : c’est l’exercice que Jésus entreprend avec nous dans ces quelques versets.
L’adultère commence dans le regard qui ne voit plus dans la femme qu’un objet de plaisir ou de consommation. L’union charnelle de convoitise ne respecte pas l’autre dans sa différence : ce n’est pas la communion dans l’amour qui est recherchée, mais la fusion dans une jouissance narcissique qui n’honore pas l’altérité. Voilà pourquoi le précepte de la Loi ne se présente pas sous une forme anonyme - du genre : « Il est défendu de commettre l’adultère » - mais sous la forme dialoguale de l’interpellation personnelle : « Tu ne commettras pas d’adultère ». La Parole fait surgir la Personne divine, qui nous invite à demeurer dans la vérité des relations interpersonnelles. Elle agit comme un « glaive à deux tranchants, elle pénètre jusqu’au point de division de l’âme et de l’esprit, des articulations et des moelles, elle peut juger les sentiments et les pensées du cœur (He 4,12) ».
C’est précisément cette action « tranchante » que Jésus illustre de façon très imagée lorsqu’il dit : « Si ton œil droit est pour toi une occasion de péché, arrache-le et jette-le loin de toi. Et si ta main droite est pour toi une occasion de péché, coupe-la et jette-la loin de toi ». Il s’agit de jeter au loin ce qui nous rapproche de l’autre de manière captative, fusionnelle et inauthentique. Cette « mutilation » de notre concupiscence est une condition de l’amour et donc de l’accès au Royaume.
Le refus de la part du Seigneur de la répudiation s’inscrit dans la même logique. Il s’agissait d’une concession accordée par Moïse en raison de la dureté de cœur des fils d’Israël, c’est-à-dire de leur incapacité d’aimer de manière vraie et durable. Emportés par leur convoitise, ils répudiaient leur femme pour s’approprier un autre objet de désir. Pour échapper à la solitude et trouver la protection d’un foyer, la femme répudiée était amenée à consentir aux avances d’un autre homme et à s’engager avec lui dans une union illégitime.
Spontanément nous vient en mémoire la première conséquence du péché des origines : « alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils connurent qu’ils étaient nus » (Gen 3, 7). Le regard de concupiscence pervertit désormais nos relations humaines ; l’opacité de la chair fait obstacle à la découverte de la dimension spirituelle de l’autre ; la hiérarchie des facultés se trouvant bouleversée, les passions de l’âme aveuglent l’intelligence et paralysent la volonté. La seule manière de sortir de ces rapports inhumains, est de renoncer à l’hégémonie du vieil homme avec ses convoitises totalitaires, pour retrouver la simplicité des relations fraternelles sous le regard du Père.
Mais ne rêvons pas : l’homme ancien en nous - « l’homme psychique et charnel » selon la terminologie de Saint Paul - ne désarme pas sur base d’une simple décision. Il ne se soumettra qu’au prix d’un long et douloureux combat de chaque instant. Les souffrances de l’Apôtre décrites dans la première lecture décrivent celles qu’aura à traverser chacun de ceux qui se sont engagés résolument dans le beau combat de la liberté : « Partout et toujours, nous subissons dans notre corps la mort de Jésus afin que la vie de Jésus, elle aussi, soit manifestée dans notre corps ». Le renoncement à la vie ancienne et l’ascèse qu’implique un tel choix, ne sont pas un but en soi, mais constituent les conditions de l’accueil de la vie nouvelle dans l’Esprit, dont un des fruits est la maîtrise de soi (Ga 5,23).

« Seigneur donne-nous assez de foi pour nous engager résolument dans le combat contre la convoitise sous toutes ses formes, dans la certitude que tu combles en surabondance ceux qui acceptent de mourir à eux-mêmes pour que la vraie vie puisse reprendre ses droits, et que tu puisses régner en eux par ton Esprit. »


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