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 - 28 mars 2024 - Saint Gontran
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Homélie

16ème dimanche du temps Ordinaire.

Après la parabole du semeur que nous avons entendue la semaine dernière, la liturgie nous permet aujourd’hui de continuer notre progression dans le discours parabolique de Jésus chez saint Matthieu. Ce sont trois nouvelles paraboles qui nous sont présentées : le bon grain et l’ivraie, le grain de sénevé, le levain dans la pâte.

Nous savons que le but des paraboles est de nous faire entrer dans la connaissance des mystères du Royaume, connaissance qui ne désigne pas une plus grande évidence intellectuelle du Royaume mais une perception intérieure de sa présence active dans le monde.
En ce sens, que nous apportent les paraboles de ce dimanche ? Que nous révèlent-elles sur l’action du Royaume dans chacune de nos vies ?

« Il en est du Royaume des Cieux comme d’un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Or, son ennemi est venu, il a semé à son tour l’ivraie, au beau milieu du blé et il s’en est allé ».
Là où le Royaume est l’œuvre, le démon pointe son nez et entre en action. N’oublions pas qu’il y a deux manières de faire l’œuvre du démon : trop en parler si bien qu’on ne pense plus qu’à lui en oubliant que Dieu est le centre de notre vie, mais aussi croire qu’il n’existe pas, qu’il n’agit pas si bien qu’on lui laisse les mains libres pour semer l’ivraie dans notre champ : « pendant que les gens dormaient ».

La parabole nous montre qu’il entre alors en action à deux niveaux. Tout d’abord, directement. Il sème de l’ivraie au milieu du bon grain et crée la confusion entre ce qui est bon et ce qui est mauvais. Face à cette situation de confusion, les directives de Jésus sont claires : « Laissez-les pousser ensemble, de peur qu’en enlevant l’ivraie vous n’arrachiez le bon grain ». Le bon grain et l’ivraie en herbe se ressemblent tellement que nous risquerions de nous méprendre : ce qui apparaît comme de l’ivraie dans les premiers signes de sa manifestation, pourrait bien porter du bon fruit au terme de sa croissance.

En tout cas, l’ivraie est tellement imbriquée dans le bon grain, qu’en voulant enlever l’un, on arracherait l’autre. Jésus nous met ainsi en garde contre la deuxième manière dont le démon peut nous tenter après avoir jeté la confusion entre le bon grain et l’ivraie. Induire dans notre cœur l’illusion de croire que nous pouvons nous-mêmes, à la lumière de notre propre intelligence, discerner de façon définitive ce qui est bon de ce qui est mauvais, c’est-à-dire que nous pouvons être juge de nos frères et de nous-mêmes, que nous pouvons être juges de la moisson c’est-à-dire de l’œuvre de Dieu dans les cœurs, autrement dit, que nous pouvons juger Dieu puisque entre Dieu et son œuvre c’est tout un.
Le piège ici n’est pas de prétendre juger entre le bien et le mal. Certes, nous sommes appelés à cheminer dans le clair-obscur d’un mélange d’ombre et de lumière qui nous atteint tous jusqu’au cœur de nos vies. Mais cela ne signifie en rien que nous pourrions négliger la distinction entre le bien et le mal : l’ivraie n’est pas du bon grain, et le bon grain ne saurait se confondre avec l’ivraie. Le bien et le mal s’imposent à tous dans les mêmes termes et avec la même exigence et ne sont relatifs en rien aux conditions subjectives de chacun.

En fait, le véritable piège est de prétendre juger du bien et du mal de notre point de vue purement humain, c’est-à-dire d’une façon définitive et clôturante à un instant donné, sans rémission aucune, enfermant l’autre ou soi-même dans sa faute sans possibilité aucune de changer. Autrement dit, en faisant l’impasse totale sur la miséricorde divine qui agit dans la durée et n’enferme jamais personne dans les actes qu’il a posés à un moment donné de sa vie.

La divine patience est sans conteste un des aspects les plus déconcertants de la miséricorde : « Ta force est l’origine de ta justice, et ta domination sur toute chose te rend patient envers toute chose. […] Toi Seigneur, qui disposes de la force, tu juges avec indulgence, tu nous gouvernes avec beaucoup de ménagement, car tu n’as qu’à vouloir pour exercer ta puissance » (Cf. 1ère lecture). Le Seigneur croit en nous, il espère en nous : « Par ton exemple, tu as enseigné à ton peuple que le juste doit être humain, et tu as pénétré tes fils d’une belle espérance : à ceux qui ont péché, tu accordes la conversion » (Cf. 1ère lecture). Dieu nous aime non pas malgré notre malice et notre aveuglement, mais à cause d’eux, c’est-à-dire : en proportion de notre misère. Certes, l’ivraie n’entrera pas dans le Royaume, mais ce n’est qu’à la moisson, c’est-à-dire quand le bon grain sera définitivement à l’abri, qu’elle sera arrachée et brûlée. Car ce n’est qu’au terme d’une vie qu’on peut en faire le bilan et encore : pas à la lumière de nos critères humains (Dans l’explication de la parabole, Jésus précise bien que ce ne sont pas les serviteurs qui moissonnent mais les Anges de Dieu), mais à la lumière de ce que l’Esprit seul peut révéler, lui qui connaît le fond des cœurs (Cf. 2ème lecture).

Laissons donc le temps et la grâce faire leur œuvre. La graine du Royaume, minuscule aux yeux des hommes, à vrai dire à peine perceptible – qu’y a-t-il donc de changé depuis la venue du Christ ? – pousse dans le secret des cœurs. Mystérieusement, le levain du Royaume se diffuse dans la pâte humaine et la travaille au plus profond. Même si nous ne percevons pas de changement spectaculaire, il fait pourtant insensiblement lever la pâte.
Voilà le lieu de notre combat : la foi en l’action cachée du Royaume dans la durée. Ne laissons pas ici sommeiller notre foi. Pendant ce sommeil risquerait fort bien d’intervenir le Malin. Notre manière de contribuer à l’avènement du Royaume c’est précisément de rester vigilant dans cette foi.

« Seigneur Jésus Christ, dans l’attente de ta venue glorieuse qui initiera la moisson, fortifie notre foi et notre espérance en ta miséricorde à l’œuvre dans les cœurs. Que nous nous efforcions ainsi de promouvoir au cœur de notre monde la croissance du bon grain afin d’être jugés dignes d’être intégrés dans le Pain Eucharistique de ton Royaume : ton Corps Seigneur Jésus. »


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