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 - 21 avril 2024 - Saint Anselme de Cantorbéry
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Homélie

Sainte Marthe

Jésus a attendu volontairement trois jours avant de se rendre au chevet de Lazare qu’il savait pourtant malade. Il a même différé délibérément son voyage jusqu’à ce que son ami soit décédé.
Marthe ne comprend pas. Elle a attendu le maître avec impatience ; elle était sûre qu’il viendrait guérir son frère, celui dont par trois fois l’évangéliste affirme que « le Seigneur l’aimait » (Jn 11,3). Et le voilà qui se présente quand tout est fini.
Apprenant son arrivée, elle part instantanément à sa rencontre pour lui exprimer sa peine, son étonnement, son incompréhension : « Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort… ». Difficile de ne pas entendre une pointe de douloureux reproche dans cette salutation. Pourtant du fond de sa douleur, Marthe résiste à la tentation du doute, du jugement, de l’amertume ; elle ajoute d’amblée : « Mais je sais que maintenant encore, Dieu t’accordera tout ce que tu lui demanderas ». Marthe s’accroche de toutes ses forces à ce dernier espoir ; certes la mort a fait son œuvre - elle précisera quelques minutes plus tard : « cela fait quatre jours déjà » (Jn 11,39) - « mais maintenant encore » tu peux intervenir ; et je sais que Dieu ne peut rien te refuser. S’agit-il d’une véritable conscience de la toute-puissance de Jésus, ou d’un déni vigoureux de la mort advenue, appuyé sur l’apparition de celui qu’elle n’attendait plus ?
« Ton frère ressuscitera » : la réponse de Jésus n’a rien d’extraordinaire ; elle exprime la conviction des pharisiens de l’époque, et Marthe l’entend bien ainsi. Elle complète en faisant mémoire de son catéchisme : « Je sais qu’il ressuscitera au dernier jour, à la résurrection ». Marthe reste au niveau d’un « savoir », qui renvoie la résurrection dans un lointain avenir ; sans se rendre compte qu’un instant auparavant elle reconnaissait à Jésus une compétence quasi divine au présent : « maintenant encore ». Délicatement Jésus la ramène à cette confession d’une toute-puissance actuelle : « Moi je suis - au présent - la résurrection et la vie ». Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; il traversera la mort naturelle sans que celle-ci ne puisse le retenir, car il vit déjà de ma propre vie. Voilà pourquoi tout homme qui vit et qui croit en moi - au présent - ne mourra jamais ».
Marthe a-t-elle compris le message ? Sa réponse pourrait le faire croire : « Oui, Seigneur, tu es le Messie, je le crois ; tu es le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde ». Pourtant quelques instants plus tard, elle hésitera devant le tombeau et objectera : « Il doit déjà sentir… ». Elle croit certes que Jésus est le Messie, mais croit-elle en lui ? Autrement dit, accepte-t-elle de dépasser ce « savoir » rationnel dont elle ponctue chacune de ses interventions, pour se laisser conduire sur l’autre rivage, celui de la foi, c’est-à-dire de l’attachement inconditionnel à la Personne de Jésus ?
Marthe donne elle-même la réponse dans le verset suivant, que la liturgie n’a pas retenu : « Là-dessus elle partit appeler sa sœur Marie et lui dit tout bas : “Le Maître est là, et il t’appelle” ». Intuitivement Marthe-la-rationnelle a compris que Marie-l’affective pourrait sans doute mieux entrer qu’elle dans l’abandon qu’implique la foi. Le recours de Marie auprès de sa soeur Marthe peut être comparé à la descente de l’intellect dans le cœur, tant il est vrai - comme le dira Pascal - que « c’est le cœur qui sent Dieu, non la raison. Voilà ce qu’est la foi : Dieu sensible au cœur, non à la raison » (Pensées, 278). Et encore : « La foi est dans le cœur et fait dire “je crois” et non “je sais” » (Pensées, 248).

« Seigneur convertis-nous, afin que “notre amour pour toi soit sans hypocrisie” (1ère lect.) ; donne-nous de “ne pas brisez l’élan de notre générosité”, mais de “laisser jaillir l’Esprit”, et d’oser nous jeter de tout cœur dans tes bras ; que notre abandon soit total et sans retour, afin que la puissance de ta résurrection puisse porter dès à présent son fruit dans nos pauvres vies. »


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