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 - 24 avril 2024 - Sainte Marie-Euphrasie Pelletier
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Homélie

6e dimanche de Pâques

« Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. » En écoutant ses paroles de Jésus, on pourrait croire que l’amour du Père et du Fils se présenterait un peu comme une récompense à celui que nous leur manifesterions. En fait, croire que dans notre relation au Père et au Fils l’initiative de l’amour nous reviendrait serait se méprendre. Ce n’est pas notre fidélité qui provoque Dieu à nous aimer mais c’est bien lui qui nous aime le premier.
Un peu plus loin dans le quatrième évangile, Jésus nous dit : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Si vous êtes fidèles à mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé fidèlement les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour. » (Jn 15,9-10) Jésus remonte ici à l’origine, à l’amour dont le Père l’a aimé et qui fonde le sien pour chacun des hommes. Le Père le premier nous a aimé. Il nous l’a manifesté en nous donnant son Fils unique pour que nous ayons la vie et la vie éternelle. Dès lors, tout croyant, en devenant par la foi un avec le Fils, entre dans un dialogue d’amour avec le Père. Il aime le Père et le Fils et cet amour appelle en retour le davantage du leur : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui » (cf. évangile). Porté, par et dans cet amour, le disciple s’exerce alors au commandement suprême : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ».
Il est capital de bien comprendre que ce commandement est avant tout une parole : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ». Parole du Père au Fils et parole du Fils à ceux qui ont choisi de marcher à sa suite, parole de vie que nous sommes appelés à garder au plus profond de notre cœur et à mettre en pratique car en elle se trouve la clé du Royaume, le secret de la vie éternelle.
Jésus opère ici un déplacement. Il passe de l’extériorité d’un commandement à l’intériorité d’une parole qui peut dès lors rejoindre les croyants de tous les âges. Les commandements de Jésus et sa parole ne font qu’un. L’obéissance du disciple aux préceptes extérieurs du Seigneur, n’est en réalité que le prolongement d’une obéissance intérieure à une parole d’amour qui est venue le transformer et le mettre en marche. Cette parole, c’est le Christ lui-même, la Parole vivante, le Verbe que le Père a prononcé sur tout homme afin qu’il soit sauvé. Le Fils est la Parole d’Amour du Père et Jésus nous le révèle lorsqu’il nous dit : « La parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père qui m’a envoyé. »
C’est grâce à l’Esprit Saint que les disciples pourront pénétrer toute la signification de cette Parole et en goûter le fruit de vie : « l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit ». Cette mention de l’Esprit Saint, nous rappelle que nous sommes presque arrivés au terme du temps qui à Pâques nous séparait encore de l’Ascension et de Pentecôte. D’une certaine manière, en ce temps pascal au cours duquel Jésus nous enseigne sur le mystère de sa résurrection, il nous tranquilise si certains points nous semblent encore obscurs. Il nous promet de nous envoyer la lumière de l’Esprit Saint et nous invite à tourner déjà notre prière et nos appels vers celui-ci.
Le fait que Dieu garde en tout l’initiative nous est encore manifesté par l’envoi de l’Esprit Saint. Jésus n’étant plus physiquement présent au milieu de nous, c’est maintenant l’Esprit-Saint, Amour commun du Père et du Fils, envoyé par le Père au nom du Fils, qui nous introduit dans ce « demeurer » en Dieu. C’est lui qui nous enseigne ce grand mystère de notre vocation à l’Amour, née de l’Amour même de Dieu pour nous. Ce faisant, il nous configure comme de vrais disciples : « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres. » (Jn 13,34-35)
Le fruit de ce commandement d’aimer qui s’exprime dans le lavement des pieds c’est la paix que nous laisse le Seigneur. Qu’il nous la donne est le fruit de sa résurrection et de l’Esprit Saint attendu : « C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne »
Autrement dit, le Seigneur nous laisse faire la paix en ce monde mais pour ce faire il nous fait le don de sa paix, de la paix qu’il est. En effet, l’Ecriture parle de la « paix de Dieu » (Ph 4,7) et plus souvent encore du « Dieu de la paix » (Rm 15,33). « Paix » n’indique pas ici seulement ce que Dieu fait ou donne, mais également ce que Dieu est. La Paix est ce qui règne en Dieu.
Dans presque toutes les religions antiques, on rencontre des mondes divins vivant des conflits internes. Les mythes cosmogoniques babyloniens et grecs font état de divinités qui se font la guerre les unes les autres. De même, dans les systèmes religieux gnostiques, il n’y a ni unité ni paix entre les éons célestes, et l’existence du monde matériel est perçue précisément comme le fruit d’un incident ou d’un désaccord survenus dans le monde supérieur.
Cet arrière-fond religieux permet de mieux saisir la nouveauté absolue de la doctrine sur la Trinité comme union parfaite d’amour dans la pluralité des personnes divines. Dans l’un de ses hymnes, l’Eglise appelle la Trinité « océan de paix » et il ne s’agit pas seulement d’une expression poétique. Lorsque l’on contemple l’icône de la Trinité de Roublev, on perçoit une sorte de paix surhumaine qui en émane. Ce n’est pas si étonnant puisque le peintre a voulu traduire, dans une image, la devise de saint Serge de Radonej, pour le monastère duquel l’icône a été peinte : « Vaincre l’odieuse discorde de ce monde en contemplant la Très Sainte Trinité ». ».
Parmi les Pères de l’Eglise, le Pseudo-Denys l’Aréopagite est sans doute celui qui a le mieux mis en valeur cette paix qui vient de l’au-delà de l’histoire, du cœur de la Trinité. Pour lui, la paix est l’un des « noms de Dieu », au même titre que « amour ». Ainsi, lorsque le Christ nous dit : « je vous donne ma paix », il nous transmet bien ce qu’il est. Le véritable et suprême « artisan de paix » n’est donc pas un homme, c’est Dieu lui-même.
La paix est caractéristique de l’agir de Dieu dans la création et la rédemption. Or le propre d’un fils par rapport à son père est de partager le même agir que lui dans une parfaite communion de volonté. Nous comprenons alors pourquoi Jésus nous dit que ceux qui œuvrent pour la paix seront appelés « fils de Dieu ».

« Père, que ton Esprit ouvre nos cœurs au don de ta Paix dans la Parole d’Amour que tu prononces sur chacun d’entre nous en ton Fils Jésus-Christ. Que ton Esprit nous enseigne à l’actualiser dans le quotidien de nos vies à travers le commandement nouveau que ton Fils nous a laissé et qui nous renouvelle dans ta vie divine chaque fois que nous le mettons en pratique en étant des artisans de paix. »


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