Homélie
samedi, 11ème semaine du temps ordinaire
Servir deux maîtres consiste à suivre deux volontés différentes, c’est-à-dire rencontrer tôt ou tard des conflits de priorité insolubles. La règle vaut que le deuxième maître soit extérieur ou intérieur. Ainsi, qui prétend être son propre maître n’est plus disponible pour faire la volonté de Dieu.
Quand il s’agit de l’argent, la question peut sembler plus délicate en ce sens que nous avons tous besoin d’argent pour vivre. Cette question n’est pas abordée pour elle même par le Seigneur. Sa référence est notre relation au Père des Cieux, celui qui s’occupe des oiseaux du ciel et des lis des champs. On attend en effet d’un maître qu’il protège. L’argent semble le faire : il met à l’abri du besoin, il donne de nombreuses sécurités et assure un confort de vie. Il peut même procurer une réelle autonomie et assurer la réalisation de la volonté propre. Mais cela est bien peu. L’avertissement que scande Jésus résonne comme une condamnation de ce faux maître : « C’est pourquoi je vous dis : ne vous faites pas tant de souci ». Servir l’argent apparaît comme une erreur profonde car il n’est pas capable de débarrasser des soucis ; au plus l’argent débarrasse des soucis liés à la contingence, au plus il met violemment l’homme en face de sa peur de l’accident, de la maladie, de la mort. Seul le Père comble car il s’occupe de nous en toutes choses : « votre Père céleste sait que vous en avez besoin ».
Nous sommes donc invités aujourd’hui à rester dans la confiance filiale. Ce qui devrait nous inquiéter est de ne plus voir Dieu comme un Père, de ne plus percevoir la vie chrétienne comme une vie filiale. Car notre vie est un don de l’amour de Dieu, un don qui ne nous sera pas repris. À nous de l’employer pour construire le Royaume, pour faire advenir la justice de Dieu : permettre à chacun de nos frères humains de recevoir ce dont il a besoin pour vivre dignement en fils de Dieu.