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 - 24 avril 2024 - Sainte Marie-Euphrasie Pelletier
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Homélie

32e dimanche du Temps Ordinaire

« Il est le Dieu des vivants : tous vivent en effet pour lui » ou encore « par lui ».
Dieu nous crée à chaque instant « vers lui », comme le précise très justement saint Augustin. Comprenons que Dieu se propose lui-même comme finalité de notre vie ; il s’offre à nous comme notre Bien suprême, vers lequel nous tendons - consciemment ou non - à travers tous nos choix.
Il est clair dès lors que la mort ne faisait pas partie du projet initial de Dieu : « Dieu n’a pas fait la mort et il ne prend pas plaisir à la perte des vivants. Car il a créé tous les êtres pour qu’ils subsistent » (Sg 1, 13-14). C’est par le péché que la mort s’est introduite dans la création : « L’aiguillon de la mort, c’est le péché » (1 Co 15, 56), nous dit saint Paul ; et le péché engendre la mort précisément parce qu’il est rupture de relation avec le Vivant qui fait vivre.
Mais « grâces soient à Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ ! » (1 Co 15, 57). Oui, gloire à Jésus-Christ notre Sauveur, qui a vaincu l’ennemie sur son propre terrain ! La Parole de Vie a épousé notre condition humaine marquée par la mort, pour triompher de celle-ci au matin de Pâques. Au jour de Pentecôte - et pour chacun de nous au baptême - l’Esprit vivificateur a déjà été déversé dans nos cœurs afin que la victoire du Ressuscité soit actualisée dès à présent dans nos vies, et donc bien avant l’instant du grand passage.
Au fil des années, la mort semble faire son œuvre - et elle la fait effectivement - mais la vie divine ne reste pas inactive : par l’Esprit qu’il nous a donné, le Christ ressuscité vit désormais bien réellement en nous, lui sur qui la mort n’a plus aucun pouvoir. Dès lors, « si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, et si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur. Donc, dans la vie comme dans la mort, nous appartenons au Seigneur » (Rm 14,8). Comment ne pas nous écrier, émerveillés, avec saint Paul : « La mort a été engloutie dans la victoire. Où est-elle, ô mort, ta victoire ? Où est-il, ô mort, ton aiguillon ? » (1 Co 15, 55). Voilà pourquoi « ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts - c’est-à-dire les baptisés - ne peuvent plus mourir : ils sont fils de Dieu, en étant héritiers de la résurrection ».
Bien sûr, nous ne pouvons pas nous imaginer ce que sera cette vie en plénitude ; l’allusion aux Anges auxquels nous serons semblables suggère une vie totalement consacrée à la louange de Dieu, dans une parfaite communion, et une éternelle action de grâce. En tout cas, puisque la mort ne fera plus son œuvre, il ne sera plus nécessaire d’assurer la survie de l’espèce : le mariage, en tant qu’institution pour perpétuer la vie n’aura plus de raison d’être. Nous vivrons dans une relation d’amour parfait avec Dieu et entre nous, c’est-à-dire dans la communion de l’Esprit, qui nous rendra participants de sa propre fécondité.
Que les époux ne s’inquiètent pas : tout ce qu’il y aura eu d’amour authentique durant notre vie mortelle sera non seulement conservé mais transfiguré : l’époux et l’épouse connaîtront Dieu dans l’incandescence de l’amour qui les unira pleinement l’un à l’autre dans une étreinte éternelle. Le mariage ne se termine pas avec la mort, mais il est transfiguré, spiritualisé. Notre Seigneur lui enlève toutes les limites qui caractérisent la vie sur la terre. De la même manière, les liens entre parents et enfants ou entre amis ne sauraient tomber dans l’oubli.
Mais que dire à ceux pour qui le mariage terrestre a été une expérience négative, d’incompréhension et de souffrance ? L’idée que le lien ne soit pas rompu même avec la mort n’est-elle pas pour eux davantage un motif d’appréhension que de réconfort ? Non, car avec le passage du temps à l’éternité le bien demeure, le mal disparaît. L’amour qui les a unis, même s’il n’a duré que peu de temps, trouve son plein épanouissement, tandis que les défauts, les incompréhensions, les souffrances qu’ils se sont infligées mutuellement, s’évanouissent.
De très nombreux conjoints n’expérimenteront le véritable amour entre eux - et avec cet amour, la joie et la plénitude de l’union qu’ils n’ont pas connues sur la terre - que lorsqu’ils seront réunis « en Dieu », car en Lui on comprendra tout, on excusera tout, on pardonnera tout.
Et que dire de ceux qui ont été mariés, de manière légitime avec plusieurs personnes comme les veufs et les veuves remariés ? (C’était précisément le cas présenté à Jésus : sept frères qui avaient eu successivement la même femme pour épouse). Pour eux également, il convient de répéter la même chose : ce qu’il y a eu d’amour et de don authentiques avec chacun des maris et des épouses, tout ce qui a été objectivement bon et venait dès lors de Dieu, tout cela ne sera pas effacé mais trouvera au ciel son accomplissement. En Dieu il n’y aura plus de rivalité ou de jalousie : ces choses n’appartiennent pas à l’amour vrai, mais aux limites intrinsèques d’une humanité encore sous le joug des conséquences du péché, limites qui disparaîtront au ciel.
Somme toutes, la seule chose pertinente que nous puissions dire sur cette « autre vie » qui nous attend et qui est déjà mystérieusement commencée, c’est qu’elle sera filiale : « Ils sont fils de Dieu » nous dit Jésus. Pour Jésus il est certain que ces quelques mots disent tout, car pour lui il n’y a pas de plus grand bonheur que celui-là : être fils du Père éternel, partageant sa propre vie en plénitude.
Vivre, aimer, louer, exulter… tous ces verbes renverront vers l’unique réalité d’une existence pleinement unifiée en Dieu, qui sera enfin « tout en tous » pour la joie de son Cœur de Père et notre bonheur éternel : « Dieu nous a prédestinés à être pour lui des fils adoptifs, par Jésus-Christ, sous son regard, dans l’amour » (Ep 1,5).
Cette destinée de gloire n’est cependant promise qu’à ceux qui auront été « jugés dignes » ; cette expression, récurrente chez saint Paul, sous-entend une mise à l’épreuve dont nous avons à sortir victorieux. Il s’agit de persévérer dans l’espérance de notre participation à la Résurrection du Christ, au cœur de la grisaille d’un quotidien qui semble s’être arrêté au vendredi saint.
Si nous n’avons pas à résister à des bourreaux comme ont dû le faire les martyrs dont il était question dans la première lecture, nous avons cependant à combattre généreusement la tentation morbide du découragement, du doute, de la lassitude d’âme.
Mais en tout cela, Dieu ne nous a-t-il pas « toujours donné réconfort et joyeuse espérance » (2nd lect.) ? Ne serait-ce pas blasphématoire d’imaginer, ne fût-ce qu’un instant, que l’amour de Dieu serait éphémère, et qu’il nous abandonnerait à la mort, lui le Dieu de l’Alliance nouvelle et éternelle, qui a vaincu la mort pour nous donner part à sa vie ?
Nous en avons la certitude : « le Seigneur est fidèle, il nous affermira et nous protègera du mal » (Ibid.) ; ceux qui mettent en lui leur confiance, qui s’appuient sur sa Parole de vérité et accueillent la consolation de son Esprit, ne seront pas déçus. Ensevelis par le baptême dans la mort du Christ, nous sommes dès à présent ressuscités en lui ; notre vie « est désormais cachée avec le Christ en Dieu » (Col 3,3) : telle est la foi qui suscite notre charité, et nous donne la force de « poursuivre notre course » (2nd lect.), dans l’espérance de la vie éternelle.

« Seigneur, "tu ne peux m’abandonner à la mort, ni laisser ton ami voir la corruption ; tu m’apprendras le chemin de la vie ; avec toi plénitude de joie, à ta droite, éternité de délices" (Ps 16). Oui, j’en ai la certitude : "par ta justice je verrai ta face, au réveil, je me rassasierai de ton visage" (Ps 16). En attendant ma nouvelle naissance à la vie véritable, ne permets pas que "mon pied trébuche, mais tiens mes pas sur tes traces ; garde moi comme la prunelle de l’œil, à l’ombre de tes ailes cache-moi" (Ibid.) ; "conduis-moi à l’amour de Dieu et donne-moi la persévérance finale". »


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