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 - 16 avril 2024 - Saint Benoît-Joseph Labre
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Homélie

4e dimanche de l’Avent

Achaz est pris entre deux menaces : celle, à ses portes, des royaumes du Nord, assiégeant Jérusalem pour le contraindre à abdiquer et celle, plus lointaine, des impitoyables conquérants Assyriens. Achaz paria sur la menace la plus lointaine mais la plus terrible ; malgré les exhortations d’Isaïe, il demanda la protection assyrienne. Ainsi, la réponse que fait Achaz à Isaïe revêt les traits de l’humilité — il prétend ne pas vouloir mettre Dieu à l’épreuve —, mais elle est de mauvaise foi : le roi a déjà choisi de se soumettre au monarque assyrien plutôt que compter sur la fidélité du Seigneur ; il fait mine de respecter Dieu, alors que pour s’attirer la faveur des dieux païens, il a immolé son fils sur leurs autels. En réalité, Achaz a complètement abandonné le Dieu de ses pères, mettant en péril la dynastie davidique.

Le Seigneur, pourtant, lui envoie son prophète. Le Seigneur, qui a promis à ses pères que la royauté n’échapperait pas à la maison de David, promet à Achaz la naissance d’un nouveau fils. Le Seigneur, bien qu’il ait été rejeté par la maison de Juda, lui reste fidèle. Rien ne l’empêchera d’accomplir ses desseins ; comme le rappelle l’évangile, il est « Dieu avec nous », où que nous soyons.

En outre, la prophétie souligne douloureusement le ridicule d’Achaz. Isaïe annonce en effet : « avant même que cet enfant sache rejeter le mal et choisir le bien, elle sera abandonnée, la terre dont les deux rois te font trembler ». Ainsi, le roi de Juda a abandonné son Dieu et commis des abominations pour tenter d’échapper à une situation qui était éphémère et sans conséquence ! Avant que l’enfant annoncé n’ait grandi, les royaumes adverses n’existeront plus. Cette précision nous dit combien nos égarements, quels qu’ils soient, sont toujours revêtus du même ridicule. Sans parler de la manière dont nous tâchons de nous en sortir par nos propres forces, notre inquiétude même est une offense à la Providence.

Toutefois, la portée de cette lecture est plus ample. La prophétie d’Isaïe dépasse en effet le contexte immédiat de sa proclamation et concerne directement la venue du Messie. « Tout cela arriva pour que s’accomplît la parole du Seigneur prononcée par le prophète », nous explique saint Matthieu dans l’évangile, montrant ainsi qu’à cette annonce du Messie par Isaïe, fait écho l’annonce de l’ange à Joseph.

D’abord, quel contraste entre les deux descendants de David ! Le premier tue l’héritier de la promesse pour sauvegarder ses intérêts particuliers, le second renonce à se marier pour ne pas risquer de gêner le projet de Dieu qu’il voit s’esquisser dans la grossesse de la femme qu’il aime. Le premier prend la parole avec cynisme pour se moquer du Seigneur qu’il a trahi, le second ne considère même pas utile de prendre la parole et il s’engage avec confiance sur la parole de Dieu. Mais Joseph seul est appelé « fils de David » car, de ces deux, il est le seul dont le cœur ait l’humilité qui plaît à Dieu. C’est dans sa maison que se réalisera la promesse. À lui qui a renoncé à tout, Dieu donne le fils que le monde attend, le sauveur qui libèrera les hommes de leur péché.

Le songe qu’il a eu est en lui-même la marque de son renoncement et de l’obéissance de sa foi. Saint Joseph est en effet visité par Dieu au cœur de son sommeil, c’est-à-dire au cœur de sa nuit, dans la profondeur de son impuissance. Joseph a fait sa part, il a courageusement discerné l’action de Dieu et il a choisi d’agir avec justice ; dès lors, il s’abandonne au bon vouloir de Dieu, quel que soit ce que cela lui coûte.

Le message de l’ange rejoint alors Joseph au cœur de ce renoncement mais ne l’efface pas. L’ange ne dit pas à Joseph qu’il s’est trompé en abandonnant ses projets personnels de mariage et de paternité, mais il lui demande d’être l’époux que Dieu veut pour la mère de son Fils. L’époux est celui qui aime. D’ailleurs, dans la Bible, saint Joseph est le seul descendant de David à qui ce titre est donné. Joseph est l’époux parce que le lien conjugal entre Marie et Joseph est une des réalités les plus importantes de l’histoire ; il est le milieu vivant où s’insère et se cache l’origine divine de l’Enfant. Il convenait que Joseph soit l’époux de Marie pour que le Verbe se fasse chair, il fallait que Joseph soit l’époux de Marie pour Jésus ait un père. Nous ne parlons pas ici de convenance au sens où les hommes parlaient autrefois de « mariage de convenance ». Il s’agit d’un impératif divin transfigurant un amour humain. En effet, entre Marie et Joseph, il existait déjà un engagement et une alliance véritable, puisque Marie « avait été accordée en mariage à Joseph ». Ainsi, le mariage voulu par Dieu n’est pas l’aventure individuelle d’un couple particulier, il est la pierre angulaire de l’Incarnation pour le salut du monde. L’œuvre de Dieu prend corps dans l’abandon de Marie et de Joseph. Prendre Marie chez lui permet à Joseph d’accueillir le don que Dieu fait par épouse et, comme toute femme, Marie avait besoin du soutien de l’amour d’un époux pour s’engager dans une maternité.

Voilà pourquoi, en ultime préparation de l’Avent, la liturgie nous tourne vers Joseph : nous avons besoin du modèle de Joseph pour accueillir le don que Dieu nous fait à Noël. C’est en recevant Marie par la foi que Joseph est entré dans la nouvelle Alliance et dans la grâce de la filiation divine adoptive. Joseph est devenu enfant de Dieu dans le Royaume au moment où il a reçu de Dieu le lien conjugal avec Marie et la mission d’être père pour l’Enfant. « Ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse ».

Le message de l’ange est bonne nouvelle pour Joseph, il l’est aussi pour nous. Car nous sommes nous aussi les destinataires de la promesse. En premier lieu, saint Paul nous rappelle que le Dieu de toute fidélité accomplit sa promesse en Jésus-Christ. « Cette Bonne Nouvelle concerne son Fils », nous révèle-t-il. L’enfant promis par Isaïe, le Messie annoncé par l’Écriture, est l’enfant Jésus ; le fils de Marie et de Joseph est le Christ. Cette Bonne Nouvelle doit être proclamée pour éviter aux hommes d’entrer dans la même défiance que le roi Achaz. Se préparer pleinement à Noël est entrer totalement dans la confiance en l’amour de Dieu, dans « l’obéissance de la foi » dont Joseph nous donne l’exemple parfait. Joseph est juste parce qu’il accepte en tout la volonté de Dieu. Or pour reconnaître en Marie l’œuvre de Dieu, pour entrer dans l’obéissance, Joseph a posé un acte d’humilité. Humilité qui exige un détachement total. Humilité qui exige d’être plongé dans une nuit où la seule lumière est la parole de Dieu. Humilité qui exige d’entrer dans la nuit de Noël où la seule lumière est un enfant fragile, le Verbe fait chair. Prendre Marie chez soi, c’est accueillir la lumière du monde qu’elle porte en son sein.

En second lieu, le message de l’ange à Joseph nous concerne parce que, comme Joseph, nous n’avons pas connu l’expérience de l’Esprit-Saint que Marie a faite. Ainsi, en révélant à Joseph que l’Esprit est à l’œuvre dans la maternité de Marie, l’ange fait plus que nommer l’Esprit-Saint : il révèle à Joseph la personne et le rôle de l’Esprit, en lien avec la mission maternelle de Marie. Finalement, l’expérience de Joseph est trinitaire. Il accueille le Père envoyant son ange, il découvre l’Enfant qui est l’Emmanuel, celui qui sauve, et enfin il rencontre l’Esprit Saint dans son œuvre. Son expérience de l’Esprit n’est pas immédiate, comme celle de Marie à l’Annonciation, mais il a été donné à saint Joseph de reconnaître et d’accueillir l’œuvre de l’Esprit en Marie. À notre tour, pour admettre et vivre la coopération de l’Esprit et de Marie, nous sommes invités à suivre l’exemple de saint Joseph en prenant Marie chez nous et en apprenant d’elle la vie de Nazareth. De cette manière, nous reconnaîtrons et nous accueillerons l’Esprit à l’œuvre dans la maternité de Marie. L’invitation de l’ange faite à Joseph de ne pas craindre et de prendre Marie chez lui, nous amène à passer par l’intercession de saint Joseph pour consentir pleinement à accueillir Marie en toute notre vie.

Saint Joseph, toi qui as préparé la crèche où le sauveur du monde a été déposé, nous te confions l’ultime préparation de nos cœurs à la joie de Noël. Apprends-nous l’humilité qui rend Dieu puissant dans nos vies, apprends-nous l’obéissance qui permet d’accueillir dans sa plénitude le don de Dieu, obtiens-nous de recevoir le Seigneur tel qu’il se donne, fais de nos cœurs une crèche où l’enfant-roi trouvera son repos et sa joie.


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