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 - 27 mars 2024 - Saint Habib
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Homélie

1er dimanche de l’Avent

La péricope évangélique de ce jour suit immédiatement la description du siège de Jérusalem (v. 20-24). Conformément à l’apocalyptique juive, la chute de la ville est présentée sur l’horizon d’un bouleversement de la création tout entière, signifiant la fin de l’ancien monde, et l’avènement du royaume messianique.
St Luc n’annonce donc pas la fin du monde ; mais le passage de l’ancienne humanité à l’Homme nouveau, l’Homme filial, désigné comme le « Fils de l’homme », celui qui apparaît sur la nuée (Dn 7, 13-14) en Juge des nations, au moment même de la chute du temple.
La venue de ce Fils dans la nuée, plus éblouissant que les astres dans le ciel, n’est pas l’événement dernier, l’instant ultime qui mettrait un terme à l’histoire : on le voit venir, il est en mouvement, il se rapproche ; sa venue n’est donc pas instantanée, mais s’étale dans le temps. De plus, s’il est voilé dans une nuée, il n’est donc pas constatable comme les évidences de la réalité ordinaire. Pour pouvoir le discerner en train de venir « avec grande puissance et grande gloire », il faut un autre regard : le regard de la foi.
Résumons notre acquis :
- l’évangéliste parle de « commencement » : ce n’est donc pas la fin du monde qui est au centre du récit, mais la venue du Fils de l’homme ; celle-ci s’opérant en rupture avec l’ancien monde.
- La description impressionnante qui nous est proposée nous invite donc à voir dans la chute de Jérusalem le signe de la proximité du Royaume. Proximité plus ontologique que chronologique puisque le Royaume est déjà là, et pourtant en devenir, secrètement présent dans chaque événement de notre vie quotidienne. Depuis la Pentecôte en effet, le salut offert en Jésus ressuscité brûle au cœur du monde comme un Feu divin prêt à tout transformer.

Cette mise en scène apocalyptique n’introduit pas au récit de l’écrasement de l’humanité par un Dieu courroucé, comme une lecture superficielle pourrait le faire craindre, puisque Jésus nous invite à « relever la tête ». Nous pourrions dire que la venue du Fils de l’homme opère comme une attraction puissante vers le haut : elle s’accompagne d’une invitation à nous tenir debout, à relever la tête, mouvement qui contraste singulièrement avec l’effondrement - nous pourrions dire à l’implosion - des éléments appartenant à cette terre, sous l’effet de la terreur.
La description de la venue du Fils de l’Homme débouche logiquement dans la seconde partie de l’Évangile de ce jour, sur l’invitation à adopter l’attitude qui correspond au temps dans lesquels nous sommes désormais entrés : « Tenez-vous sur vos gardes » ; littéralement : « Méfiez-vous de vous-mêmes ».
La vigilance est une attitude essentielle au christianisme. Dieu vient sans cesse au cœur de nos histoires, mais pour le découvrir dans la trame des événements, il faut demeurer vigilant ; il faut veiller pour ne pas céder aux « distractions » - au sens pascalien - qui ne conduisent qu’à alourdir notre cœur, à l’opacifier, à le river toujours plus à cette terre, le rendant de moins en moins capable de discerner celui qui vient « faire toutes choses nouvelles ».
La vigilance était déjà l’attitude des prophètes de la première Alliance ; mais depuis la résurrection du Verbe fait chair, elle a atteint son paroxysme, car il s’agit désormais de discerner la présence de l’Époux qui est venu, qui vient, et qui viendra, afin de lui emboîter le pas, et d’entrer avec lui dans la salle des noces. La vigilance de tout instant est le visage que prend la foi lorsqu’elle acquiert la lucidité des mains vides. Elle est l’attitude fondamentale de la période de l’Avent dans laquelle nous entrons aujourd’hui.
Jésus lui-même nous a donné l’exemple : il a vécu toute sa vie sous le signe de la vigilance à laquelle il nous invite à notre tour. Il est le Vigilant par excellence ; en lui, la vigilance de la foi dévoile sa véritable identité : elle est accueil de l’éternel aujourd’hui de Dieu au cœur de l’histoire mouvante des hommes.
La volonté de son Père, dont il faisait sa nourriture, ne lui était pas dictée : Notre Seigneur devait la découvrir ; et il n’hésitait pas à passer des nuits entières en prière pour la discerner. Comment dès lors pourrions-nous faire l’économie de ces temps de recueillement, d’écoute dans le secret du cœur, de relecture de notre vie sous le regard de Dieu ?
Depuis que le Seigneur est venu marcher sur nos routes, tout événement est appelé à devenir, dans la lumière de la foi, le lieu d’une épiphanie de Dieu ; du Dieu qui agit au cœur de l’histoire des hommes et de chaque homme en particulier. Tout dans nos vies est porteur de sens, tout est parole à décrypter, appel à accueillir, en vue d’y répondre : « Le salut est maintenant plus près de nous qu’au moment où nous sommes venus à la foi » ; à tout instant il est donc « l’heure de nous réveiller de notre sommeil ».
Dans cette perspective d’une eschatologie inscrite au cœur de l’histoire, l’Eucharistie est centrale. Elle est le lieu par excellence où s’opère la rencontre entre l’événement ultime et le temps présent. La Messe anticipe l’avenir, en l’accueillant dans le présent. Elle signifie que le Règne est déjà là, mais que nous cheminons vers lui dans le clair-obscur de la foi. Il ne s’agit plus d’un événement futur, puisqu’il est advenu dans la résurrection du Christ ; c’est par la vigilance du cœur que nous sommes invités à le découvrir dans l’épaisseur de chaque instant, comme promesse de la transfiguration à venir. C’est précisément ce que le Seigneur réalise pour nous dans chacune de nos célébrations : « Quand il fut à table avec eux, il prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards. Alors ils se dirent l’un à l’autre : “Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route, et qu’il nous faisait comprendre les Écritures ?” » (Lc 24,30-32)

« Seigneur, Père très saint, renouvelle en ce temps de l’Avent, notre vigilance : que nous puissions trouver la présence lumineuse du Christ dans l’obscurité de nos vies quotidienne, afin de courir au devant de lui, puisqu’il vient dans la gloire. Amen. »


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