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 - 28 mars 2024 - Saint Gontran
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Homélie

Octave de Pâques

On ne sait guère avec certitude où se situe le « village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem ». Il aurait sans doute sombré depuis longtemps dans l’oubli s’il n’y avait pas eu deux pèlerins, bientôt rejoints par un troisième, qui s’y étaient rendus « le troisième jour après la mort de Jésus ». Nous ne connaissons le nom que d’un de ces deux hommes : Cléophas ; l’autre pourrait être chacun de nous aux heures sombres du doute, de la tristesse, de la lassitude, du découragement. N’avons-nous pas tous connu des jours où, suite à certains évènements, tout devient absurde ; notre vie nous apparaît comme un échec, et rien ne semble pouvoir changer le cours des évènements ? La tentation qui nous guette alors est la fuite : partir, en laissant derrière nous nos problèmes - comme si nous ne les portions pas d’abord en nous-même - tourner le dos à la réalité devenue un fardeau trop pesant ou un sac de nœuds trop complexes, et fuir par le chemin d’Emmaüs.
La plupart des maîtres spirituels parlent abondamment de cette épreuve. Ce qui ne signifie pas qu’elle serait spécifique à ceux qui cheminent vers des états « mystiques » : elle est probablement le lot de toute trajectoire humaine. Mais la vie spirituelle est-elle autre chose que l’intégration de notre vie « ordinaire » dans la perspective nouvelle offerte par l’Evangile ? La grâce ne se superpose pas à la nature de manière extrinsèque ; mais elle l’éclaire et la féconde de l’intérieur, donnant une valeur surnaturelle aux péripéties de notre vie toute humaine, si du moins nous consentons à les lire à la lumière de la foi et de l’espérance que nous offre l’Esprit Saint.
Chemin faisant, nous découvrons que ceux que la tradition appelle « les disciples d’Emmaüs » ne l’étaient pas vraiment - ou du moins pas encore - au début de leur parcours. Ils avaient suivi ce « Jésus de Nazareth » parce qu’ils « espéraient qu’il serait le libérateur d’Israël ». C’est pourtant à ce point de leur cheminement que le Seigneur les rejoint, les invitant à exprimer leur souffrance, leur déception, leur découragement. Le changement de perspective sur les événements de notre vie nécessite cette mise à distance dans la parole qui verbalise la rupture de sens, cause de la souffrance.
Le second temps consiste à reconnaître notre perplexité - « Vous n’avez donc pas compris ! » -, à nous tourner pauvrement vers Dieu, à lui redire que nous croyons que nos vies sont dans ses mains, et à lui demander de nous éclairer sur le sens des évènements que nous subissons.
« Comme votre cœur est lent à croire : ne fallait-il pas que le Messie souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ! » Nous ne marchons jamais seul sur nos chemins de souffrance, car le Christ nous y a précédé pour pouvoir nous y accompagner. Pour entendre ce mystérieux compagnon nous expliquer le sens de nos épreuves, il faut l’écouter là où il nous parle : dans les Ecritures où il interprète sa vie et la nôtre à la lumière des promesses de Dieu. Mais il n’est pas facile d’arrêter de « ressasser » nos problèmes, pour nous mettre à l’écoute d’un Autre qui nous adresse une Parole n’ayant, à première vue, pas grand-chose à voir avec ce que nous vivons. Pourtant, tous ceux qui en ont fait l’expérience peuvent en témoigner : c’est là, dans l’humble écoute de la Parole, que Dieu donne sa paix. « Notre cœur n’était-il pas tout brulant tandis qu’il nous parlait sur la route et qu’il nous faisait comprendre les Ecritures ? »
Certes, nous ne devons pas attendre une réponse toute faite, mais nous donnant la paix de son Esprit, le Seigneur nous met dans les conditions requises pour trouver la solution, ou du moins pour persévérer courageusement sur notre chemin de croix, sans dévier ni à droite ni à gauche, tant que nous n’aurons pas la certitude que c’est lui qui nous y invite.
La vie est-elle autre chose qu’un long pèlerinage vers la cité sainte ? Au cours du voyage, nous jouissons d’aubes claires, mais nous avons inévitablement à traverser des nuits d’angoisses. Lorsque nous nous enfonçons dans les ténèbres, « efforçons-nous de retenir » le Seigneur : « Reste avec nous : le soir approche et déjà le jour baisse ». Approchons-nous de la Table où il rompt le Pain après nous avoir expliqué les Ecritures ; il ouvrira nos yeux et nous découvrirons sa présence. Alors nous pourrons confesser, pleins d’espérance : « C’est vrai ! Le Seigneur est ressuscité ! De quoi aurions-nous peur ? »

« Seigneur, tout comme aux disciples d’Emmaüs, c’est dans l’Eucharistie que tu nous donnes rendez-vous : c’est là que nous sommes invités à déposer nos fardeaux, à retrouver la joie dans le renouvellement de l’Alliance, et le courage de reprendre notre route. Chaque célébration n’est-elle pas le mémorial de ta victoire sur toute mort ? Aussi est ce là que nous pouvons entendre l’Église nous redire, avec l’autorité que tu lui as conférée : “Au nom de Jésus-Christ, le Nazaréen, lève-toi et marche” (1ère lect.). »


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