Homélie
Assomption de la Vierge Marie
« Le dernier ennemi détruit, cest la mort » : ces paroles de Paul nous aident à comprendre le mystère que nous célébrons aujourdhui. En Marie élevée au ciel, saccomplit le dessein damour du Père sur toute humanité. En elle, le mystère de la Rédemption porte pleinement son fruit : préservée de tout péché par une grâce découlant de la Croix de son Fils, cest encore de lui quelle reçoit la vie divine lui permettant de traverser la mort sans connaître la corruption. Exaltée à sa droite, intronisée Reine de la création visible et invisible, Marie vit désormais de la vie même de son Fils ressuscité.
Si depuis le péché des origines la mort est notre lot commun, nous croyons, en contemplant lascension de Jésus et lassomption de Marie, quelle na pas le dernier mot. Car si tous nous mourrons en Adam à cette vie naturelle, « cest dans le Christ que tous revivront » à la vie divine sur laquelle la mort na plus aucun pouvoir. A la lumière de lAssomption, nous découvrons que la mort est désormais « le passage vers la vie à la rencontre de lAmour. Elle est le passage vers la béatitude céleste réservée à ceux qui uvrent pour la vérité et la justice et sefforcent de suivre le Christ » (Jean-Paul II, 15.VIII.2001).
Le mystère que nous célébrons en ce jour nous vient de lOrient : au VIe s. la fête de la « Dormition » y était déjà célébrée, et il revint à lempereur Maurice (582-602) de la fixer définitivement le 15 août. Le terme « dormition » veut souligner la douceur du passage accompli par Marie de cette vie terrestre à la vie divine en Christ. Le pape Théodore (642-649) introduira cette solennité quelques années plus tard en Occident, où elle prendra le nom d« Assomption ». Ce vocable veut signifier que Marie ne sélève pas au ciel par ses propres forces, mais quelle y est élevée. En elle, saccomplit la prophétie du Magnificat : « Dieu élève les humbles ». Ainsi les deux termes sont complémentaires et permettent de faire le lien entre la douceur et lhumilité de la Mère et celles de son Fils qui déclarait solennellement : « Devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cur, et vous trouverez le repos » (Mt 11,29). Cest parce que Marie fut la première et la plus fidèle parmi les disciples, quelle a pleinement communié à la douceur et à lhumilité de lAgneau, et quelle a dès lors pu trouver en lui le repos que Dieu réserve à ceux qui acceptent de « renaître deau et dEsprit » (Jn 3,5).
Cest pour cela que Marie nous est présentée au cur de lété, comme un signe réconfortant qui nourrit notre espérance. Exaltée en son Fils à la droite du Père, elle « a pour manteau le soleil, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles » (1ère lect.). Autrement dit : elle participe pleinement à la glorification de son Fils ressuscité - drapée du soleil - et à sa victoire sur tout mal - piétinant la lune. En elle saccomplit pleinement « le salut, la puissance et la royauté de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ » (Ibid.). En elle nous contemplons notre propre destinée, et nous relançons notre marche à travers les vicissitudes du temps présent, vers la Cité céleste, la Jérusalem den haut où Dieu nous attend pour « essuyer toute larme de nos yeux » (Ap 21,4). Sur ce chemin, nous savons que le secours de Dieu ne nous fera pas défaut. De même que, avertie par lAnge, « Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée » pour se mettre au service de sa cousine Élisabeth, ainsi Notre-Dame continue à venir vers nous qui sommes ses enfants, afin de nous « conduire au désert où Dieu nous a préparé une place », à labri des attaques du Dragon. Ce lieu nest rien dautre que son Cur immaculé, tabernacle du Très-Haut, « Tente de la rencontre » sur laquelle repose la nuée (Ex 40, 34), où nous pouvons nous tenir en présence du Dieu vivant pour ladorer.
« Seigneur, tandis que nous poursuivons notre pèlerinage en cette vallée de larmes, nous tendons loreille vers ta Parole de vérité qui nous révèle notre destinée glorieuse, telle quelle sest déjà pleinement accomplie en Marie. Toi le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs, tu tes laissé séduire par la beauté de ta créature et tu veux nous introduire dans ta gloire. Tu nous revêts détoffes dor, tu nous pares de tes propres mérites (cf. Ps 44). Oui tu as aimé ton Église, tu tes livré pour elle ; tu voulais te la présenter à toi-même, sainte, resplendissante, sans tache, ni ride, ni aucun défaut ; tu la voulais sainte et irréprochable (Ep 5,25-27). Pour tant de grâces nous te rendons grâce, car nous sommes sûrs quavec laide maternelle de la Vierge Marie, tu sauras nous conduire jusquen ta demeure, toi le Dieu fidèle qui accomplit toujours ses promesses. »