Saint Vincent de Paul, prêtre,

« Comme le temps approchait où Jésus allait être enlevé de ce monde, il prit avec courage la route de Jérusalem. » (Lc 9,51) Jésus, se déplace de la Galilée, lieu du succès de ses prédications et de ses guérisons, vers Jérusalem, le lieu où il va mourir (Cf. Lc 13,33), crucifié entre deux brigands, le lieu de son enlèvement (Lc 9,51).
Pour aller de Galilée en Judée, un passage obligé : la Samarie. Jésus envoie alors des messagers pour préparer sa venue. Mais les Samaritains, en raison du contentieux qu’ils ont avec les Juifs, refusent de le recevoir.

Jacques et Jean, scandalisés par l’attitude des Samaritains, veulent faire descendre sur eux le feu du ciel pour les punir. Ils se rappellent sans doute qu’Elie avait fait lui aussi tomber le feu du ciel, mais ils ont oublié que ce ne fut pas sur une ville et ses habitants mais sur le sacrifice du mont Carmel (Cf. 1 R 18, 37-38). En bons disciples de Jean-Baptiste, ils ont aussi entendu dire leur ancien maître que « le Messie brûlerait la paille avec le feu qui ne s’éteint pas » (Lc 3,17). Mais de quel feu s’agissait-il ?

Leur réaction manifeste qu’ils n’ont pas encore compris l’identité et les desseins du maître qu’ils ont choisi de suivre. Quel peut bien être ce chemin sur lequel ils se sont engagés à la suite du Seigneur ?
Jésus en donnait déjà une indication en choisissant délibérément de passer par la Samarie pour se rendre à Jérusalem. Il rompait ainsi avec l’hostilité juive vis-à-vis des Samaritains mais sachant pertinemment qu’il serait rejeté. C’est déjà la croix qui se profilait à l’horizon.

La mission de salut du Fils de l’homme commence par le fait d’être rejeté. Une fois encore, nous est révélé ici que la passion rédemptrice de Verbe de Dieu est la raison même de son Incarnation. Comme notre Seigneur le rappelle lui-même : « c’est pour cette heure qu’il est venu » (cf. Jn 12,27). Et à travers cette mission se manifeste son identité : il est le Serviteur souffrant venu servir et donner sa vie en rançon pour la multitude.

La toute-puissance par laquelle Jésus nous sauve ne réside pas dans une force extraordinaire qui lui permettrait de faire tomber la foudre. Le feu brûlant qu’il veut faire descendre sur les hommes est celui de son Amour qui se manifeste dans l’humilité de son abaissement et dans l’humiliation de sa passion.
Son dessein de salut, le bras du Seigneur l’accomplit par un mystérieux Serviteur qui meurt accablé de souffrance et de mépris (Cf. Is 53). Mais de cette mort parce qu’elle est synonyme de don total par Amour, la puissance divine fait jaillir la vie des multitudes justifiés : Juifs, Grecs, Païens, ou Samaritains ; hommes d’hier, d’aujourd’hui ou de demain.

« Seigneur, enseigne-nous à concilier amour et détermination dans le témoignage de notre foi. Quand nous nous sentons rejetés ou offensés à cause de notre foi, quand nous voulons que le feu tombe sur ceux qui s’opposent à nous, fais-nous regarder vers Jérusalem, vers la croix que tu as librement acceptée pour nous révéler le visage d’un Dieu de miséricorde venu sauver ceux qui étaient devenus ses ennemis. »