Homélie
Férie
« Ne vous faites pas des trésors sur la terre ». Le mot trésor est fortement chargé par notre imaginaire. Un trésor a motivé la quête de bien des pirates ou des chevaliers pour lesquels nous avons vibré dans les contes de nos enfances. Le prix dun trésor peut être variable, il peut même navoir dimportance que pour celui qui le possède. Il peut aussi être si précieux quil soit lié à notre raison dêtre. Mais quelque soit ce trésor, une chose est sûre : il faut le mettre en sécurité.
Cette notion est si évidente quon peut locculter. On peut entendre dans lopposition que fait Jésus un conseil damasser plutôt un trésor fait de biens célestes que de biens terrestres, de biens éternels que de biens périssables. Or Jésus ne nous parle pas du contenu du trésor, de ce à quoi nous attribuons une valeur, mais du lieu où nous lenfouissons pour le protéger. « Ne vous faites pas des trésors sur la terre, ( ) faites-vous des trésors dans le ciel ». Les biens thésaurisés sont les mêmes ici-bas ou dans le ciel, cest à nous quil revient de les choisir, mais Jésus nous demande de les enfouir dans le ciel et non sur la terre.
Alors seulement, le contenu du trésor est mis en question. Pour être placé dans le Ciel, de quoi peut-il être composé ? De tout manifestement, puisque Jésus ne semble pas mettre de restriction. Il ne semble pas y avoir de « poids » limite qui conditionnerait cette « ascension » de notre trésor dans le ciel. Les mots employés nous trahissent. Le Ciel nest pas au dessus des nuages. Il est don de soi. La différence entre un trésor sur la terre et un trésor dans le ciel est la différence entre amasser, égoïstement et cupidement, et donner, dans la charité fraternelle. On fait fructifier son trésor, dautres paraboles nous le rappellent, quand on lexpose, quand on le partage, quand on le donne.
Doù lavertissement de Jésus. « Là où est ton trésor, là aussi sera ton cur ». Si nous cédons à la cupidité et à lenvie, notre trésor est sur la terre, notre cur y sera donc aussi, et il en mourra. Pour que notre cur vive, il lui faut entrer dans la dynamique de la vie, qui est don de soi : il ne se dilate que sil aime.
Ce choix de lemplacement de notre trésor est donc crucial. Or il dépend de notre capacité à discerner. Il dépend de notre il. Lil éclaire tout le corps de la lumière quil perçoit de lextérieur. Lil simple est celui qui ne se laisse pas séduire par la cupidité et la jalousie. Lil mauvais est avare de ses biens, ou envieux de ceux des autres. Il est obscur et plonge tout le corps dans lobscurité.
Que le Seigneur ouvre les yeux de nos âmes à la grandeur de son amour et nous introduise dans la contemplation du trésor quil nous a acquis : sa vie, en plénitude, quil donne de vivre dès à présent pour nous faire déjà goûter la joie du Ciel. Si nos yeux voient clair, le contenu du trésor nous apparaîtra avec évidence : Dieu, lui-même. Ne lemprisonnons pas dans nos logiques terrestres, laissons-nous gagner par le Ciel, laissons-nous bonifier par notre trésor et nous serons transformés en lui.