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 - 28 mars 2024 - Saint Gontran
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Homélie

14e dimanche du Temps Ordinaire

« Dieu qui as relevé le monde par les abaissements de ton Fils, donne à tes fidèles une joie sainte : tu les as tirés de l’esclavage du péché ; fais-leur connaître le bonheur impérissable, par Jésus- Christ, Notre-Seigneur. »
L’oraison d’ouverture nous invite à oser demander à Dieu « le bonheur impérissable », c’est-à-dire la participation à sa propre béatitude. Pourtant, l’affirmation de Jésus est très claire : « Personne ne connaît le Père, sinon le Fils ». Il est inutile de nous hisser sur la pointe des pieds : nous n’atteindrons jamais le ciel par nos propres forces. Car Dieu est l’infiniment autre, d’une nature incommensurable à la nôtre ; nous ne pouvons le connaître que dans la mesure où il se révèle à nous, et que nous nous mettons dans les dispositions d’accueillir cette révélation en son Fils unique.
C’est précisément cette attitude de réceptivité à l’égard de l’initiative du Père, que Notre-Seigneur décrit par le terme de « tout-petits ». Seuls ceux qui, reconnaissant leur ignorance, renoncent à leur propre sagesse et acceptent de s’ouvrir à Dieu, peuvent découvrir son visage de Père. Car le Très-Haut se révèle en se donnant, et c’est précisément en se recevant de lui, comme le Fils unique se reçoit à chaque instant de son Père que les « petits » découvrent sa paternité.
« Personne ne connaît le Fils sinon le Père » qui l’engendre de toute éternité. C’est en regardant le Père que le Fils se connaît dans son essence. A fortiori ne nous connaissons-nous pas nous-mêmes, mais devons-nous recevoir la révélation de notre identité filiale dans le don que le Père nous fait à chaque instant de la « vie, du mouvement et de l’être » (cf. Ac 17,28).
« Personne ne connaît le Père » : comment pourrions-nous connaître Dieu ? Ne s’agit-il pas plutôt d’être connus de lui en nous laissant combler de sa Présence dans l’Esprit, en qui nous devenons ses enfants ? C’est précisément cela la foi : connaître Dieu dans la lumière de sa présence au plus intime de nous-mêmes où il a voulu élire sa demeure. Cette connaissance est bien réelle, même si elle n’est pas ressentie, car le Tout-Autre se reflète réellement en nos cœurs pour y reconstituer son image et nous unir à lui dans l’amour. Le plus humble acte de foi nous rend participants de la vie divine (cf. 2 P 1,4) par l’action de l’Esprit Saint qui s’unit à notre esprit pour nous permettre de confesser Jésus-Christ Seigneur et Sauveur, unique chemin vers le Père.
Croire, c’est prendre sur soi le joug de Jésus, devenir son disciple ; c’est renoncer à être à nous-même notre propre origine, et oser courir le risque de la confiance filiale, en acceptant de dépendre totalement d’un Autre reconnu comme Père. Cette proposition est au cœur du christianisme, et dans la foi, nous en reconnaissons la pertinence ; mais qu’elle est difficile à mettre en pratique dans notre monde qui exalte tout au contraire la suffisance de l’individu, et exècre toute forme de dépendance, fût-elle de l’amour. Celui qui en nous revendique cette autonomie n’est autre que le vieil homme, c’est-à-dire la part obscure de nous-même agissant « sous l’emprise de la chair », que Saint Paul dénonce dans la seconde lecture.
Or le « fardeau » dont Jésus veut nous soulager, est précisément celui de nos fausses identités accumulées au fil des années et des circonstances, celui de notre prétention à l’autosuffisance, voire celui de la rivalité avec un Dieu que nous cherchons secrètement à manipuler. Le « joug » qu’il nous offre en échange, est la douceur et l’humilité d’un cœur filial qui s’abandonne entre les mains du Très Haut comme un enfant dans les bras de sa mère.
Car ce Père est aussi une Mère : le baptême n’est-il pas une nouvelle naissance ? Dieu ne nous a-t-il pas engendrés à la vie divine par la résurrection de son Fils et dans l’Esprit (2nd lect.) ?
Père, Mère et Epoux : si Dieu nous recrée à son image, n’est-ce pas ultimement pour nous unir à lui dans l’amour comme l’Epoux s’unit à son Epouse ? « Exulte de toutes tes forces, fille de Sion ! Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! Voici ton roi qui vient vers toi : il est juste et victorieux, humble et monté sur un âne, un âne tout jeune » (1ère lect.). Par sa victoire sur « les désordres de l’homme pécheur » (2nd lect.), ce Roi d’humilité et de douceur fera fleurir la justice et la paix, ces dons messianiques par excellence, que l’homme charnel ne peut cultiver. A condition bien sûr que nous acceptions de venir à lui et de prendre sur nous son joug.
Le « joug » dans le langage biblique, représente la Loi. Cette Loi qui nous accuse et nous enferme dans la peur des représailles d’un Législateur intransigeant. C’est de cette idole et de nos culpabilités morbides que Jésus veut nous sauver, en nous manifestant le vrai visage de Dieu ; visage d’un Père qui se révèle « dans sa bonté » ; visage d’une Mère « pleine de tendresse et de pitié » (Ps 144), qui nous réengendre dans sa miséricorde afin de nous « procurer le repos » ; visage du Roi Epoux qui triomphe de nos résistances par la douceur et l’humilité de son amour crucifié.

Et si nous prenions comme résolution de demeurer attentifs, tout au long de cette semaine qui s’ouvre devant nous, aux invitations concrètes que Notre-Seigneur nous adresse à venir à lui, lorsque nous peinons sous le poids du fardeau de l’épreuve, de la contradiction, de l’incompréhension, d’un travail que nous ne parvenons pas à assumer, voire d’un péché dont nous ne réussissons pas à nous débarrasser ? Plutôt que de nous raidir dans une attitude volontariste, ou de nous refermer sur nous-même et sur notre impuissance, ou encore de nous laisser glisser dans le victimisme ou le découragement, faisons plutôt mémoire de la Parole que nous venons d’entendre : un ami nous attend, qui est capable de nous arracher à notre trouble, notre lassitude, notre culpabilité, notre impuissance ; un ami qui peut nous procurer le repos, au moment où nous en sommes le plus éloignés. C’est ainsi que nous découvrirons peu à peu que nous ne sommes jamais seuls ; une lumière reste allumée au cœur des situations les plus obscures ; dans les impasses les plus resserrées, une porte demeure ouverte. Alors nous nous exclamerons comme Jacob : « Vraiment, le Seigneur est dans ce lieu ! Et moi, je ne le savais pas ! ». Saisi de crainte filiale, d’émerveillement et de reconnaissance, nous ajouterons avec le patriarche : « Que ce lieu est redoutable ! Il est réellement la maison de Dieu, la porte du ciel ! » (Gn 28, 16-17).

« Dieu de tendresse, par Jésus ton Fils, tu nous a montré ton visage de Père. Qu’à ton image, nous devenions doux et humbles de cœur pour annoncer ton Royaume aux siècles des siècles » (Or. Pr. Univ.).


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