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 - 28 mars 2024 - Saint Gontran
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Homélie

Saint Calliste Ier, pape et martyr,

La foule qui se rassemble autour de Jésus grossit sans cesse : ils sont déjà des « dizaines de milliers » - entendons : un nombre incalculable. En absence de tout service d’ordre, on imagine sans peine la cohue : « on s’écrasait ». Sans micro il n’est plus possible d’enseigner une telle assemblée : Notre-Seigneur « s’adresse d’abord à ses disciples » qui sont chargés de répercuter fidèlement sa parole afin que tous puissent l’entendre.
Mais qu’est-ce qui attire ainsi ces hommes et ces femmes sur les traces de ce Rabbi charpentier ? Le fait qu’il accomplisse des guérisons et autres miracles ? Sans doute la foule y est-elle sensible. Mais il souffle surtout autour de lui un vent de liberté, capable de pousser au large leur vie, loin des enfermements dans lesquels l’âme étouffe et se sclérose. L’exhortation de ce jour le confirme.
Notre-Seigneur s’en prend vigoureusement à l’hypocrisie des pharisiens. L’étymologie du terme nous donne son sens : « discerner en dessous » ; l’intériorité de l’hypocrite diffère de l’apparence extérieure qu’il se donne ; son identité véritable demeure cachée sous des faux-semblants ; l’être et l’apparaître ne correspondent pas : il n’est pas en vérité. Jésus dénonce l’hypocrisie de l’attitude religieuse de ceux qui « chargent les gens de fardeaux impossibles à porter, mais qui eux-mêmes ne les touchent pas d’un seul doigt » (Lc 11,46). Comme une pâte qui se soulève sous l’action du levain, ces hommes se gonflent d’orgueil et se donnent en spectacle par des attitudes de piété toutes extérieures. Ils briguent « les premiers rangs dans les synagogues et les salutations sur les places publiques » (Lc 11,43) mais leur cœur est loin de Dieu et ils ne cherchent pas « la justice et l’amour » (11, 42).
L’hypocrite est toujours culpabilisant pour son entourage qu’il cherche à manipuler ; d’où le sentiment d’étouffement. Il n’y a rien à opposer à ses raisonnements qui disent vrai ; et cependant ils sonnent faux en raison de leur inadéquation avec l’agir de celui qui les propose. D’où le malaise dont l’hypocrite profite pour assurer son pouvoir. Jésus vient déchirer ce voile de mensonge, autant pour libérer la victime que le coupable - chacun d’entre nous étant tout à tour l’un et l’autre. L’hypocrisie est toujours l’œuvre du dia-bolos, celui qui nous divise intérieurement et pervertit nos relations, car il sait que là où il y a duplicité et mensonge, l’amour ne peut plus fleurir et la vie s’éteint.
Le poison est aussi spirituel, car celui qui est hypocrite avec son prochain l’est aussi avec son Dieu. Hélas en croyant pouvoir tromper le Seigneur en cachant son péché sous des allures de sainteté, l’hypocrite se prive de la miséricorde dont il s’exclut lui-même. A cette suffisance mensongère du pharisien hypocrite, Jésus oppose l’humilité vraie du publicain repentant (Lc 18). Le début de la sagesse c’est de se laisser convaincre de péché ; la croissance de la sagesse est au prix d’un combat sans merci contre notre suffisance ridicule et l’hypocrisie qui en découle ; et la plénitude de la sagesse réside dans la crainte filiale de Dieu.
« Oui je vous le dis, c’est celui-là que vous devez craindre : celui qui, après avoir tué, a le pouvoir d’envoyer dans la géhenne », ou de donner part à sa propre vie. Le Père ne refuse sa grâce à aucun de ses enfants : son Fils les a tous purifiés dans le Feu de son sacrifice d’amour. Mais le salut ne nous sera pas imposé : la miséricorde divine se répand en nos cœurs dans la mesure du besoin que nous en éprouvons. L’hypocrite, qui est « convaincu d’être juste » (Lc 18,9) et médit de son frère « dans l’ombre » de son cœur perverti, se prive lui-même de la grâce ; tandis que celui qui reconnaît ouvertement sa misère et confesse son péché, entendra Jésus lui dire « mon ami » et se verra offrir, dans l’Esprit, « une première avance sur l’héritage dont nous prendrons possession au jour de la délivrance finale » (Ep 1,14) ; car c’est « la foi en Dieu qui rend juste l’homme coupable ; qui fait de lui un juste, parce que Dieu l’estime tel » (cf. 1ère lect.).
Soulignons encore que Jésus dénonce la médisance comme une forme d’hypocrisie : « tout ce que vous aurez dit dans l’ombre, à l’oreille dans le fond de la maison ». Celui qui proclame devant les hommes qu’il croit en Dieu, mais maudit (dit du mal de) son frère dans le secret, trahit la contradiction interne qui le ronge comme une rouille invisible.
Déclarons donc une guerre sans merci à toute forme d’hypocrisie : en pensée, en parole ou en action. Il n’y a hélas pas que les pharisiens qui sont menacés par ce levain qui fait gonfler la pâte humaine, produisant l’enflure disgracieuse - au sens étymologique - de l’orgueil. Que la parole de vérité fasse en nous son œuvre de salut en nous purifiant de toute duplicité et de tout mensonge ; qu’elle bannisse toute crainte de nos cœurs, et nous établisse fermement dans la confiance, car nous valons plus, aux yeux de notre Père, que tous les univers qu’il a créé pour nous.

« Seigneur “je ne t’ai pas caché mes torts, je t’ai fait connaître ma faute, et toi tu n’as pas retenu mon offense, tu as pardonné mon péché !” (Ps 31) Aussi je veux te craindre tous les jours de ma vie, toi qui m’as arraché à la géhenne et qui “m’as estimé juste en raison de ma foi, indépendamment de ce que j’ai accompli” (1ère lect.). Comment pourrais-je encore maudire mes frères, eux que tu justifies avec la même largesse ? Sois béni pour ta miséricorde ineffable, Dieu de bonté, toi qui me combles de joie et “m’entoures de chants de délivrance” (Ps 31). »


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