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 - 16 avril 2024 - Saint Benoît-Joseph Labre
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Homélie

Nativité du Seigneur, messe de la nuit,

La première lecture nous dit à qui s’adresse le mystère que nous célébrons ce soir : au « peuple qui marchait dans les ténèbres ». Noël est une fête pour ceux qui peinent dans les ténèbres. Pour ceux qui n’ont aucune ressource pour porter un regard d’espérance sur le monde. Pour ceux qui sont tellement accablés, qu’ils n’envisagent pas que quelque chose puisse changer. Cette fête est d’abord pour ceux qui ressemblent aux bergers.

Les bergers sont toujours à l’honneur dans nos crèches, parce que le Bon Dieu les a réhabilités en se faisant lui-même berger. Mais ils n’ont pas toujours été objet d’une telle affection. La Mishna, en effet, classe leur métier parmi les plus méprisables, le Talmud doute de leur capacité à suivre les prescriptions de la Torah, les portes des synagogues se ferment souvent devant eux, et le peuple voit couramment en eux des menteurs et des voleurs. Les bergers sont des pauvres parmi les pauvres, ils ont les sentiers pour maison et le ciel pour abri.

Les bergers sont aussi à l’honneur dans nos crèches parce qu’ils sont pour nous un exemple sympathique. Ils comptent, en effet, parmi les personnes pour qui le mot « demain » n’a pas de sens. « Aujourd’hui » est pour eux un présent uniforme et hostile, qui n’ouvre pas sur un avenir dont on puisse rêver. Un berger n’a son mot à dire pour rien, il ne prend la parole que pour rendre compte des bêtes qui lui ont été confiées. Il ne nous faut pas beaucoup d’imagination pour deviner que dans les nuits de veille à garder les bêtes, l’obscurité a englouti bien des larmes que personne n’a pu voir. Le sentiment d’être de trop et de n’être rien a érodé en eux l’espérance que Dieu lui-même puisse les accueillir.

Mais ce soir, une parole vient remplir ce vide. Une voix s’est fait entendre, annonçant quelque chose de beau, quelque chose de neuf. Un cantique est entonné, qui les entraîne hors d’eux-mêmes vers quelque chose de totalement inconnu. La voix céleste qu’ils entendent est la voix de Dieu. Une voix qui emporte toutes ténèbres sur son passage, qui apporte une joie que nul ne peut se donner : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, paix sur la terre aux hommes qu’il aime ! »

La joie de Noël n’est pas la joie qu’on éprouve un jour d’anniversaire. Elle n’est pas seulement la joie qu’on éprouve à l’occasion d’un événement heureux. Ce soir, notre joie est le don de Dieu. Or le don de Dieu, c’est Dieu lui-même. C’est dire que notre joie est Dieu lui-même. Dieu est notre joie. Voilà pourquoi elle est parfaite, voilà pourquoi nul ne pourra nous la ravir. Parce que rien ne pourra jamais nous séparer de Dieu, parce que Dieu se donne sans jamais se reprendre, parce que Dieu se donne pour que nous fassions l’expérience de sa vie.

Ce soir Dieu vient au devant des bergers. A ceux qui marchent dans la longue nuit de leur souffrance, le Seigneur offre la consolation de sa présence. Lui, le Dieu qui se fait proche, se manifeste dans un enfant. C’est une façon pour lui de nous dire la vie nouvelle qu’il nous offre en partage. Il est notre renouveau, il est notre avenir.

Tel est l’avènement que nous célébrons. Tel est le jour nouveau qui se lève sur l’humanité. Dieu en effet ne naît pas un jour, mais il fait le jour en naissant. Lorsqu’il se fait chair, il s’ouvre sur le monde d’une manière qui le renouvelle et l’illumine de l’intérieur.

Cette force du Créateur, cet avenir glorieux pour l’humanité, se fait petit enfant. Il se révèle dans son humilité. Lorsqu’il s’incarne, le Seigneur de l’Univers fait l’expérience humiliante de la dépendance totale. Il choisit de s’en remettre entre nos mains. Cette expérience de dessaisissement est au cœur du message de Noël. Jésus-Christ est pleinement Dieu et pleinement homme. Par l’enfant de la crèche, il nous enseigne que pour habiter pleinement notre humanité, il nous faut commencer par un dessaisissement radical de nous-mêmes. La marche sur les chemins de l’humanité renouvelée dans le Christ débute par l’acceptation de n’être soi-même qu’avec les autres. Autrement dit, nous n’habiterons pleinement notre chair qu’en devenant membres du corps du Christ, en devenant frères.

L’enfant divin nous apprend cela. Noël est une expérience d’incorporation. Le Verbe se fait chair, il se lie dans une relation de dépendance avec l’humanité. Et, au cœur de la célébration de cette nuit, il se donne à nous dans la fragilité d’une hostie. Là est la réponse que nous pouvons lui apporter. La communion que nous pouvons choisir. Dieu s’y révèle comme notre force, notre source, notre avenir. Nous comprenons en le contemplant que nous ne pouvons rien hors de lui.

Peut-être est-ce ainsi que nous avons à lire le regard de Marie sur l’enfant qu’elle offre à notre contemplation. Il s’agit du regard de la mère qui voit celui qui dépend d’elle. Il s’agit du regard de l’Église qui contemple celui dont elle dépend entièrement.

Ainsi, dans cette nuit bénie, notre confiance se fait plus solide, car nous sommes enfin débarrassés de compter sur nous-mêmes ! Nous pouvons vraiment compter sur la puissance rédemptrice du Verbe fait chair. C’est avec lui que nous vaincrons en nos vies toute forme de ténèbres, car il est, lui, la vraie lumière.

Allons donc à la grotte de Bethléem pour le rencontrer. Accueillons-le avec reconnaissance, lui la lumière qui surgit dans la nuit du monde. Laissons-le nous combler de ses dons, demandons-lui de faire de nous des fils de Dieu puisqu’il a voulu devenir fils de l’homme. Ouvrons-lui les portes de notre histoire et qu’il nous fasse la grâce de nous accueillir près de son berceau.

Venez, adorons-le !


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