5ème jour dans l’octave de Noël.

Pour la première fois, Jésus entre à Jérusalem et pour la première fois la présence du Christ Seigneur remplit le Temple. Pour les juifs, le Temple était le lieu de la Gloire du Seigneur, préfiguré par la Tente de la Rencontre dans le livre de l’Exode dont la prise de possession par le Seigneur nous est relatée en ces termes : « La nuée couvrit la Tente du Rendez-vous, et la gloire du Seigneur emplit la Demeure. Moïse ne put entrer dans la Tente du Rendez-vous, car la nuée demeurait sur elle, et la gloire du Seigneur emplissait la Demeure » (Ex 40, 35).
Lorsque, dans la prophétie de Siméon, Jésus reçoit ce titre de Gloire (2, 32), c’est toute la prophétie d’Isaïe qui annonçait la manifestation eschatologique de la Gloire de Dieu dans le Temple qui s’accomplit.

Jésus et donc identifié à Dieu, en même temps qu’au Temple, sa demeure. Mais il est aussi identifié au peuple qu’il vient purifier, consoler et libérer. Cette seconde identification se réalise dans l’évangile à travers les deux personnages de Siméon et d’Anne qui nous sommes présentés comme ces pauvres du Seigneur, selon l’expression vétéro-testamentaire, attendant la consolation et la libération d’Israël.

Siméon c’est le peuple attendant son Messie Sauveur, Fils de Dieu, qu’il peut enfin prendre dans ses bras. Anne, c’est le Temple - qu’elle ne quitte pas – qui attendait d’être transfiguré de l’intérieur par la gloire de Dieu, qui attendait la manifestation en lui de Dieu lui-même.

Mais dans la personne de ce petit enfant, la gloire et la souffrance sont déjà liées indéfectiblement l’une à l’autre. Siméon prophétise : « Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. - Et toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée. - Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre. »

La venue du Messie Fils de Dieu ne peut laisser indifférent et oblige à se positionner : qui n’est pas avec moi est contre moi, nous dit Jésus dans les évangiles. Celui qui est la « gloire d’Israël » est aussi établi pour la chute des uns et le relèvement des autres. Signe de contradiction, le Fils devra lui-même subir les effets de la division opérée par sa présence en prenant sur lui, lors de sa Passion, le joug de l’adversité portée à son paroxysme. Mais, c’est de cette manière qu’il en triomphera.
L’épée, le glaive du jugement, sera aussi celui de la souffrance pour le Fils. La souffrance qui transpercera alors le Fils transpercera aussi la mère. Ainsi s’accomplira le salut des nations.

C’est tout ce mystère de notre rédemption que Jésus va amener avec Marie et Joseph à Nazareth. En effet, notre passage d’évangile est directement suivi de la mention du retour à Nazareth de Jésus avec Marie et Joseph : « Lorsqu’ils eurent accompli tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, nous dit l’évangile, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth. »
L’accomplissement de la Loi à Jérusalem est suivi du retour des parents dans « leur ville ». Ce n’est plus Bethléem mais Nazareth. Ce n’est plus la « ville de David » mais une bourgade méprisée. Dans la même dynamique, comme à Noël, on passe de la Gloire à la mangeoire. Ce mouvement est celui-là même de la rédemption : Dieu est descendu au plus profond de notre humanité, acceptant de se dessaisir de ses prérogatives divines, pour nous rendre participants de sa divinité.

« Seigneur béni sois-tu de t’être abaissé pour nous élever jusque dans ta gloire. Toi la lumière des nations, tu es venu accomplir ce salut pour tout homme. Donne-nous la grâce de t’accueillir comme le fit Siméon. Comment pourrions-nous avoir peur d’un Dieu qui s’est fait petit enfant ! »