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 - 16 avril 2024 - Saint Benoît-Joseph Labre
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Homélie

Êpiphanie du Seigneur,

L’Evangile de cette fête de l’Epiphanie contraste étonnamment avec la première lecture : les cris de joie annoncés par le prophète Isaïe ne sont pas au rendez-vous. Certes, ce sont bien « les rois des nations qui marchent vers la lumière de Jérusalem, vers la clarté de l’aurore qui se lève » (1ère lect.) dans ses faubourgs ; mais les responsables du peuple de Dieu ne sont guère « radieux » ; leur cœur « frémit », mais non de joie : plutôt d’inquiétude voire de peur. Le moins qu’on puisse dire, c’est que Jésus ne suscite pas l’enthousiasme, bien au contraire : Hérode va tout faire pour éliminer au plus vite ce gêneur indésirable. Le tragique malentendu sur la royauté que Notre-Seigneur vient instaurer va aller s’aggravant tout au long de sa vie, jusqu’à être invoqué comme motif de sa condamnation à mort : « Celui-ci est Jésus, roi des Juifs » (Mt 27,37). A peine né, celui que les Anges ont annoncé comme le Prince de la paix, le Sauveur venu réconcilier les hommes avec Dieu, est suspecté, perçu comme un intrus, un fauteur de trouble, une menace pour le pouvoir en place.
Pourtant le comportement même de Jésus ne laissera aucun doute : « sa royauté ne vient pas de ce monde » (Jn 18,36). La cour des rois de la terre n’est pas composée de bergers mal famés, ni leur entourage de pêcheurs du lac de Galilée de mauvaise réputation. Les grands de ce monde ne se préoccupent guère des pauvres, des malades, des exclus ; ils ne s’abaissent pas à laver les pieds de leurs disciples. Aussi les mages seront-ils finalement les personnages les plus huppés parmi ceux qui vont s’approcher de Notre-Seigneur. Ils devaient ainsi témoigner aux yeux du monde entier, que « les païens sont associés au même héritage qu’Israël, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Evangile » (2nd lect.).
En « se prosternant devant l’Enfant », ces hommes venus d’Orient préfigurent tous les païens - et nous en sommes - qui tout au long de l’histoire viendront adorer le Roi de gloire couché dans une mangeoire. L’épiphanie ouvre sur l’universalité du salut offert gratuitement à tous les hommes « qui cherchent Dieu avec droiture et dont lui seul connaît la foi » (Pr. Euch. n° IV). En ce sens, la fête de l’Epiphanie est plus importante encore que celle de la naissance « historique » du Christ à Bethléem : nous célébrons aujourd’hui la manifestation glorieuse du Verbe de Dieu au milieu de nous. Pourtant il reste une ombre au tableau, et de taille : alors que les païens se réjouissent, les fils des prophètes, eux qui étaient chargés de conduire les hommes jusqu’au Messie, se bouchent les oreilles pour ne pas entendre et ferment leurs yeux pour ne pas voir.
Comme le soulignait Benoît XVI aux jeunes rassemblés à Cologne autour de l’Evangile de ce jour : « nous aussi, nous devons faire un choix. En réalité, à bien y réfléchir, c’est précisément l’expérience que nous faisons en participant à chaque Eucharistie. À chaque Messe, en effet, la rencontre avec la Parole de Dieu nous introduit à la participation au mystère de la croix et de la résurrection du Christ et ainsi nous introduit à la Table eucharistique, à l’union avec le Christ. Sur l’autel est présent Celui que les Mages virent couché sur la paille : le Christ, le Pain vivant descendu du ciel, l’Agneau véritable qui donne sa vie pour le salut de l’humanité. Éclairés par sa Parole, c’est toujours à Bethléem - la “Maison du pain” - que nous pourrons faire la rencontre bouleversante avec la grandeur inconcevable d’un Dieu qui s’est abaissé jusqu’à se donner à voir dans une mangeoire, jusqu’à se donner en nourriture sur l’autel. Pouvons-nous imaginer la stupeur des Mages devant l’Enfant emmailloté ! Seule la foi leur permit de reconnaître sous les traits de cet enfant le Roi qu’ils cherchaient, le Dieu vers lequel l’étoile les avait guidés. En lui, comblant le fossé entre le fini et l’infini, entre le visible et l’invisible, l’Éternel est entré dans le temps, le Mystère s’est fait reconnaître, se donnant à nous dans les membres fragiles d’un petit enfant ».
« Aujourd’hui, méditait Saint Pierre Chrysologue, les Mages considèrent avec une profonde stupeur ce qu’ils voient ici : le ciel sur la terre, la terre dans le ciel ; l’homme en Dieu, Dieu dans l’homme ; et celui que le monde ne peut contenir, enfermé dans le corps d’un tout-petit. »
L’univers entier est invité à la crèche, et c’est Dieu lui-même qui envoie les cartons : n’est ce pas le Seigneur qui a fait signe à ces étrangers en leur dépêchant une étoile afin de les conduire jusqu’à Bethléem ? Cette même étoile qui fut annoncée il y a bien longtemps déjà, par le voyant païen Balaam : « De Jacob montera une étoile, en Israël se lève un homme » (Nb 24,17). Leur itinéraire passe par Jérusalem, car « le salut vient des Juifs » (Jn 4,22) ; mais le messager céleste les dirige plus loin, jusqu’à une humble demeure où est offert à leur adoration un simple enfant présenté par deux jeunes époux de condition modeste. En déposant leur or devant le Roi des rois, en offrant l’encens au grand Prêtre, et en pourvoyant à la myrrhe de sa mort rédemptrice, ces païens devenus « chrétiens » avant l’heure, sont entrés dans l’intimité de Dieu : « ils ne sont plus des étrangers ni des gens de passage, mais ils sont devenus citoyens du peuple saint, membres de la famille de Dieu » (Ep 2,19). Aussi le Seigneur les avertit-il personnellement « en songe de ne pas retourner chez Hérode, mais de regagner leur pays par un autre chemin ». Comment pourraient-ils retourner comme ils sont venus, maintenant que « leurs yeux ont vu le salut que le Seigneur préparait à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations » (Lc 2,30-31), en attendant de « donner gloire à son peuple Israël » (Lc 2,32), le jour où lui aussi obtiendra miséricorde (cf. Rm 11,31). La lumière qui brillait dans la nuit d’hiver de Palestine, brille désormais dans le ciel de leur cœur : en repartant, ils ne quittent pas l’Enfant, car en échange des présents qu’ils lui ont apportés, il s’est donné lui-même à eux, n’ayant rien d’autre à leur offrir.
Nous aussi, “entrons, inclinons-nous, prosternons-nous, adorons le Seigneur qui nous a faits. Oui il est notre Dieu ; nous sommes le peuple qu’il conduit, le troupeau guidé par sa main » (Ps 94, 6-7). Que tous les rois se prosternent devant lui, que tous les pays le servent : en ce jour-là fleurira la justice, grande paix jusqu’à la fin des lunes » (Ps 71).

« Seigneur accorde-nous de nous tourner vers le Christ présent dans le Sacrement de l’Autel, avec la même stupeur, le même émerveillement, que les mages venus d’Orient. Et donne-nous de nous convertir vraiment, afin que notre vie brille dans la nuit de ce monde, comme une étoile qui indique où les hommes peuvent trouver leur Sauveur. »


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