Catholic.net International English Espanol Deutsh Italiano Slovensko
 - 21 avril 2024 - Saint Anselme de Cantorbéry
Navigation: Homélie

 

Homélie

Saint Jérôme Emilien,

Jésus laisse les scribes et pharisiens à leurs réflexions. Se tournant vers la foule, il l’interpelle vivement : « “Ecoutez-moi tous, et comprenez bien”. Ne faites pas comme les pharisiens qui refusent d’entendre mes arguments, mais ouvrez votre intelligence au bon sens et vos cœurs à l’Esprit pour adopter l’attitude juste : “Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui pénètre en lui ne peut le rendre impur” ». Il n’est pas sûr cependant que cette sentence prononcée par Notre-Seigneur ait vraiment été entendue : la suite de notre péricope montre la perplexité des disciples eux-mêmes.
Un premier niveau d’interprétation conduit à la conclusion explicitée par l’évangéliste : « Jésus déclarait purs tous les aliments ». Il s’agit incontestablement d’une première rupture par rapport à la tradition juive. Ce n’est d’ailleurs qu’après être « rentré à la maison », que seul à seul avec ses disciples, Jésus les conduit à tirer cette conclusion. Désormais le lieu d’enseignement de la vraie doctrine n’est plus la synagogue, mais le lieu d’habitation des disciples rassemblés autour du Maître. La « maison » renvoie à la jeune Eglise, qui devra se souvenir de cet épisode pour sauvegarder sa liberté face à la pression des milieux judaïsants. On entend un écho de cette controverse dans l’exhortation adressée par saint Paul aux chrétiens de Rome, auxquels s’adresse également saint Marc : « Le royaume de Dieu ne consiste pas en des questions de nourriture ou de boisson ; il est justice, paix et joie dans l’Esprit Saint » (Rm 14,17).
Mais il est un second niveau d’interprétation, ouvrant sur une liberté toute nouvelle et bien plus révolutionnaire encore, que nous n’avons sans doute pas fini de nous approprier. Là où les Juifs s’entouraient de mille précautions rituelles pour se protéger des souillures du monde extérieur, Jésus nous invite à mettre tout notre effort à nous prémunir des souillures intérieures du péché. Le chrétien n’a pas à chercher à se différencier par des pratiques qui le mettent à part des autres hommes : il doit tout au contraire être « le sel de la terre ». Or le sel est intimement mêlé aux aliments pour en relever la saveur - entendons : nous avons à vivre étroitement unis à tous nos frères pour témoigner auprès d’eux de la finalité surnaturelle que Jésus est venu donner à la vie de tout homme, sans exception. Pour être crédible, il faut bien sûr que notre parole s’accompagne du témoignage d’une authentique transformation intérieure. Mais comment faire : Jésus ne dit-il pas que « tout le mal vient du dedans et rend l’homme impur » ? Comment pourrions-nous être témoins de la lumière si nous sommes encore dans les ténèbres ?
Notre-Seigneur ne nous demande pas l’impossible : l’être charnel en nous n’est certes capable de rien de bon, mais ne sommes-nous pas nés d’eau et d’Esprit (cf. Jn 3,5) ? S’il nous envoie à sa moisson, c’est au nom de ce principe nouveau de discernement et d’action que nous avons reçu en germe au jour de notre baptême, et qui ne demande qu’à grandir et à porter son fruit. Telle est notre responsabilité personnelle : mettre tout notre effort à nous détourner de nos passions aliénantes, en consentant aux mouvements de la grâce divine qui nous apprend patiemment à vivre comme des enfants du Royaume. Il ne s’agit pas de confondre tentation et péché ; mais dès que nous entrebâillons la porte de notre cœur, dès que à l’instar d’Eve, nous commettons l’imprudence d’engager un dialogue avec le Tentateur, le consentement n’est pas loin. Peut-être même est-il déjà donné ? Seule l’action mauvaise délibérément posée - qui résulte toujours d’un consentement venant « du dedans » - nous rend « impurs », au sens où elle affaiblit notre relation à Dieu, voire nous sépare de lui.
Entre la culpabilisation scrupuleuse devant ce qui n’est qu’une tentation, et la banalisation des actes mauvais librement consentis, Jésus nous invite à la voie droite de la responsabilité morale, qui commence par la vigilance du cœur, se fortifie dans la prière, et trouve son achèvement dans une parfaite docilité à l’Esprit Saint.

« Seigneur, nous ne doutons pas que ta grâce nous accompagne chaque jour, mais tu connais notre faiblesse. De plus, ce n’est pas “contre des hommes, mais contre nos complicités avec les forces invisibles, les puissances des ténèbres qui dominent le monde” que nous avons à combattre. Envoie sur nous ton Esprit, afin que nous puissions “tenir, ayant autour des reins le ceinturon de la vérité, portant la cuirasse de la justice, ne quittant jamais le bouclier de la foi, qui nous permettra d’arrêter toutes les flèches enflammées du Mauvais” (Ep 6,11-16) ».


Accueil | Version Mobile | Faire un don | Contact | Qui sommes nous ? | Plan du site | Information légales