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 - 28 mars 2024 - Saint Gontran
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Homélie

Saint Polycarpe, évêque et martyr,

Dans l’évangile de ce jour, il est essentiellement question du scandale provoqué contre les « petits » qui ont foi en Jésus. Marc veut sans doute parler de ces chrétiens peu instruits de son époque qui risquaient d’être négligés par les disciples. Jésus avertit de ne pas les « scandaliser », littéralement, de ne pas leur « dresser d’obstacles ».
« Scandale » est pris ici dans le sens biblique fort de « piège », piège tendu sous les pas de ces chrétiens dont la foi naissante était encore en germe et donc fragile. Jésus va expliciter comment l’homme peut être une pierre d’achoppement pour ses frères en montrant que le piège qu’il tend à l’extérieur n’est que le reflet d’une intériorité pervertie. « Perverti » signifie détourné de son sens originel. Voilà pourquoi la suite de notre péricope résonne comme un appel à la conversion c’est-à-dire comme un appel à redresser ce qui est tordu en nous.

« Si ta main… si ton pied… si ton œil t’entraînent au péché, coupe-les ». Jésus nous invite à nous convertir sur trois points qui touchent aux relations que nous entretenons avec nos frères. La main, le pied, l’œil : trois organes que nous utilisons pour communiquer avec autrui. Mais que veut dire Jésus quand il parle de les couper ? Bien sûr, il ne s’agit pas d’une invitation à se mutiler physiquement. Alors comment lire et interpréter ces images ?
Il me semble que Jésus touche ici trois de nos péchés fondamentaux. Le pied désignerait le péché d’autonomie, le fait d’aller là où l’on veut sans rendre de compte à personne et encore moins à Dieu. La main représenterait le fait de nous approprier ce que nous recevons d’autrui, qu’il soit notre frère en humanité ou Dieu lui-même. Enfin, l’œil signifierait nos envies jamais assouvies, nos jalousies, nos regards silencieux qui emprisonnent, qui réduisent l’autre à n’être qu’un objet. Trois péchés qui nous replient sur nous-mêmes, nous enferment dans la solitude et nous empêchent de nous ouvrir à nos frères et à Dieu. Trois péchés qui nous déshumanisent en s’attaquant à notre être relationnel.

Mieux vaut alors tailler dans ces démarches de domination et cet égoïsme qu’échapper à la « vie ». Voilà la signification des paroles de Jésus. Il est important de remarquer que Jésus nous renvoie ici à notre responsabilité : « coupe-le ». C’est bien à moi d’agir, de couper ce qui en moi est mauvais et m’entraîne au péché. Jésus ne fait pas à ma place. Autrement dit, si je ne veux pas me convertir, Dieu ne me forcera pas. Autant ma liberté peut-elle coopérer à la grâce, autant peut-elle y faire obstacle. Il est donc des cas où l’amputation d’un membre peut sauver l’homme tout entier. Car c’est bien de notre salut dont il est question ici. L’enjeu est grand : « la géhenne » ou « la vie éternelle ».

La « géhenne » était ce lieu de la vallée au sud de la colline de Jérusalem qui servait de décharge publique à la cité. On y trouvait toutes sortes d’immondices, de cadavres d’animaux en décomposition. Pour les contemporains de Jésus, elle représentait le sort juste de ceux qui se seraient fermés aux appels de Dieu.
L’image de la « géhenne » est à l’origine de la vision dantesque de l’enfer. Mais il ne s’agit pas de se représenter l’enfer comme un lieu mais plutôt comme un état, état dans lequel l’homme s’enferme lorsqu’il refuse sa destinée de gloire, lorsqu’il refuse la vie éternelle. N’est-ce pas là la conséquence de toute rupture de relations, de toute rupture d’alliance avec Dieu et avec nos frères ?

En renvoyant ici l’homme à sa responsabilité de se détacher de ce qui en lui pourrait l’entraîner sur ce chemin, Jésus présente finalement l’enfer comme l’ultime possibilité de l’homme. Car pour être aimé par l’homme, Dieu l’a créé libre de le choisir, mais aussi de le refuser. L’enfer est donc cet état de refus par l’homme de son origine et de sa fin. Dieu ne prédestine donc personne à aller en enfer. Mais il adresse à l’homme un appel à la responsabilité dans l’usage de sa liberté en vue de son destin éternel et un appel à la conversion en se détachant de ce qui l’entraîne au péché.

Le « sel » auquel Jésus fait référence à la fin de notre péricope pourrait donc bien signifier le renoncement dont Jésus vient de parler et qui confère au disciple sa vraie particularité à l’imitation de son Maître.
L’épreuve, symbolisée par le feu, jugera de l’engagement du disciple et de son abnégation. Le sel de l’alliance et du service désintéressé n’est-il pas ce qui permet de consentir les sacrifices nécessaires pour accueillir les petits en vérité et assurer paix et unité dans la communauté ? « Ayez du sel en vous-mêmes et vivez en paix les uns avec les autres » (v. 41). La boucle est bouclée ! Jésus revient au thème initial de son entretien avec ses disciples commencé au verset 35 de ce même chapitre 9 de Marc : « si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier et le serviteur de tous ».

« Seigneur Jésus, merci pour le cadeau précieux de notre liberté. Donne-nous de savoir en faire usage pour coopérer à ton œuvre de salut en nous et autour de nous. Que nous sachions renoncer à tout ce qui nous entraîne au péché, particulièrement à tout ce qui nous coupe de toi et de nos frères. Que le feu de ton Esprit vienne nous purifier pour que le sel de notre vie chrétienne ait la saveur du service de la charité et de la paix. »


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