jeudi, 2ème semaine de Pâques.

Les lectures que nous venons d’entendre sont unanimes : Jésus est notre Sauveur, et le salut est à accueillir maintenant.

Le discours que proclame Pierre devant ses juges est clair. Il se s’agit plus de se limiter à rendre témoignage en faveur de Jésus, comme au temps où il annonçait la bonne nouvelle à tout Jérusalem, car, à présent, le grand prêtre en témoigne, toute la ville est gagnée à l’évangile ! Pierre s’engage plutôt dans une relecture du dessein de salut de Dieu sur l’humanité ; il relit les événements passés, les interprétant à la lumière de la résurrection, mettant ainsi en valeur le projet de Dieu. Il souligne cette splendeur : par Jésus-Christ, Dieu nous remet nos péchés, et de surcroît, il nous donne de pouvoir nous convertir, il nous apporte la conversion, selon ce qu’il avait promis par les prophètes de faire de nous son peuple.

Il est cependant un cadre nécessaire à ce don gratuit du salut. Le discours de Pierre est très explicite qui commence par « Il faut obéir à Dieu », et qui se termine par « L’Esprit Saint, que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent ». En première lecture, il s’agit bien entendu d’une injonction adressée au sanhédrin. C’est une ultime mise en demeure qui leur est adressée, une main tendue pour se positionner en faveur de Dieu Sauveur, de Jésus-Christ. L’itinéraire que saint Pierre leur ouvre est celui du renoncement au pouvoir : le salut implique de déposer sa volonté propre et de choisir l’obéissance.

La question nous est évidemment posée à nous aussi. Mais à la lumière de l’évangile, ce discours de l’apôtre prend une autre teneur. La voie de l’obéissance est celle de la soumission à l’Esprit Saint ; elle est celle du disciple, qui trouve ici le critère ultime de l’authenticité de son témoignage.

Dans les deux lectures en effet le témoignage est central, et surtout il est remarquable par sa nouveauté. Jusqu’au jour de la résurrection, la valeur du témoignage était évaluée selon les Ecritures. Elles s’étaient révélées comme le critère ultime de vérité. Et voici que saint Luc constate un déplacement. Maintenant que le mystère de la résurrection est déployé, l’Esprit Saint est le fondement des témoignages. C’est-à-dire que nous avons maintenant accès au principe même des Ecritures. Pour le dire avec les mots de saint Jean, le Verbe s’est fait chair. De l’Ecriture a jailli la Parole, donnée dans le souffle de l’Esprit. A nous de l’accueillir.

Or accueillir l’Esprit Saint, c’est accueillir la vie divine dont le Père investit pleinement le Fils.

L’obéissance et le don rythment donc le mouvement de la vie éternelle. Et la condition pour recevoir le don de la vie filiale est la foi au Fils dans le don et l’obéissance de toute la vie.

Toutes ces considérations sont bien connues, et mais il ne faudrait pas les soupçonner de n’être qu’un simple résumé. Certes, nous savons que l’homme terrestre refuse le témoignage de Jésus sur ce qu’il a vu au ciel, et que le disciple reçoit par la foi le don de la vie qui le rétablit pleinement dans sa condition de fils.

Mais il est dans ces lignes de saint Jean une réelle nouveauté qu’il ne faut pas occulter : le jugement est actuel. Il consiste dans l’accueil ou le refus du témoignage de Jésus. Ce que nous dit l’évangile, c’est que la foi est dès maintenant l’ouverture à la vie éternelle.

La résurrection, hier éblouissement qui nous faisait sortir dans toute ville et propager la joie de la Bonne Nouvelle, est aujourd’hui entrée, discrète mais résolue, dans l’intimité du mystère trinitaire. Le Fils atteste ce qu’il a vu, le Père est celui qui donne souverainement, parce qu’il aime. Il aime le Fils et il aime le monde. Il transforme l’humanité dans le feu vivifiant de son esprit et la remet entre les mains de son Fils.

La Parole de Dieu nous invite donc ce soir à nous émerveiller de ce mystère, à nous y introduire avec la délicatesse que mérite cette intimité offerte, pour apprendre à trouver notre joie dans la joie de Jésus Epoux.