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 - 27 mars 2024 - Saint Habib
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Homélie

Saint Louis de Gonzague, religieux,

N’y a-t-il pas hypocrisie à cacher son action comme le suggère Jésus ? Ainsi prendre une mine réjouie alors qu’en réalité je fais pénitence, n’est-ce pas introduire un écart entre l’être et le paraître, ce qui pourrait fort bien définir l’hypocrisie ?
Si Jésus nous suggère fortement « d’éviter d’agir devant les hommes », c’est-à-dire de laisser paraître au dehors ce que nous offrons intérieurement à Dieu, ce n’est bien sûr pas pour nous inciter à la duplicité, mais parce qu’il connaît nos cœurs, et sait fort bien que nous « agirons devant les hommes pour nous faire remarquer ». Par un subtil déplacement, l’action qui au départ était intentionnellement orientée vers la glorification de Dieu, devient finalement une auto-idolâtrie. Or c’est là que commence précisément la véritable hypocrisie : notre agir ne tend plus vers ce qu’il semble viser extérieurement, mais est récupéré à notre profit. Sous couvert de religiosité, nous sommes en fait au service de notre réputation.
A travers cette exigence, Jésus nous aide à prendre conscience que nous sommes citoyens de deux mondes : le monde extérieur, visible, social ; dans lequel chacun de nous cherche à se faire une place, à préserver sa réputation, à paraître sous son meilleur aspect, fût-ce au prix des pires compromissions ; et un monde intérieur, invisible, dans lequel chacun de nous est « seul avec le Seul », et où nous avons à décider du sens de notre vie en choisissant de nous mettre au service de la charité, par amour pour Dieu. Or la charité est par définition désintéressée, gratuite ; l’amour détourné de sa finalité - à savoir le bien exclusif de l’autre - est un amour abusif. L’étymologie de ce terme dit bien ce qu’il signifie : « ab-usare », utiliser en dehors de sa finalité ; détourner de son but. Un tel amour n’est plus qu’une caricature mensongère, hypocrite de la charité et est dès lors doublement haïssable.
Raison de plus pour s’étonner de la motivation que Jésus suggère ! « Evitez d’agir devant les hommes pour vous faire remarquer ; autrement il n’y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux ». Si nous agissons en vue d’une gratification - fût-ce celle que le Père réserve à ceux qui lui obéissent - ne sommes-nous pas à nouveau tombés dans le piège de l’amour intéressé ? Ou est alors la gratuité, dont nous avions souligné qu’elle est essentielle à la charité ?
Tout dépend de la nature de la « récompense » promise. S’il s’agissait d’un accroissement de biens personnels (avoir, pouvoir, gloire), l’objection serait fondée. Mais dans le contexte du Sermon sur la Montagne, la seule gratification entrevue consiste à ressembler toujours plus à « notre Père qui est aux cieux », lui qui donne à tous en surabondance dans une parfaite gratuité. Autrement dit, la récompense de l’amour vrai, n’est autre qu’un accroissement de charité, qui nous détourne toujours plus des motivations spontanément égoïstes du vieil homme.
Si les fenêtres de mon cœur sont opaques, elles me renverront mon image comme dans un jeu de miroir, et je deviendrai ma propre idole, détournant tout à mon profit, y compris le service de Dieu et du prochain. Mais si ces mêmes fenêtres sont purifiées dans le creuset de la Parole et au Feu de l’Esprit, elles deviennent des vitraux au travers desquels je devine la présence lumineuse du Tout Autre, qui en m’appelant à lui, me délivre de ma prison intérieure, et m’ouvre à l’altérité et à la charité. Tout le parcours du Sermon sur la Montagne se présente comme un exode de nos terres d’aliénation vers la Cité Sainte où nous attend celui que Jésus nous apprend dès maintenant à prier en esprit et vérité : « Notre Père ».

« “Aimez le Seigneur, vous ses fidèles : le Seigneur veille sur les siens. Il les cache au plus secret de sa face, loin des intrigues des hommes” (Ps 30). Enseigne-moi tes voies, Seigneur ; apprends-moi à “vivre comme un juste” ; donne-moi la force de te suivre sur ce chemin d’une vie livrée sans retour, qui seul donne accès à la vraie liberté ; la liberté filiale de ceux qui ont accepté de perdre leur vie par amour pour toi et pour leurs frères. »


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